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25 Décembre 1989 – Exécution du président roumain Nicolae Ceausescu

Kiss the Hand You Cannot Bite: The Rise and Fall of the Ceausescus | Amazon.com.brRoumanie 1989 : l’histoire d’une révolution confisquée25 Years After Death, A Dictator Still Casts A Shadow In Romania | All Things Considered | WNYCLe vent de changement qui souffle sur l’Europe de l’Est attise le mécontentement en Roumanie et emporte le régime dirigé par Nicolae Ceausescu (1918-1989). Le président et son épouse Elena sont jugés et exécutés. Nicolae Ceausescu (1918-1989) dirige les destinées du Parti communiste et de l’État roumain. Son régime autoritaire et centralisé est miné par des problèmes économiques, dont la rareté des biens essentiels, qui avivent la contestation. Ceaușescu's mistakes against Romanians and his show trialEn novembre 1987, les grèves déclenchées par les ouvriers automobiles de Brasov dégénèrent en émeutes. Les pénuries de nourriture, le programme d’urbanisation des villages du gouvernement et le mouvement de libéralisation qui secoue l’Europe de l’Est en 1989 donnent un nouveau souffle aux opposants du régime. Le 16 décembre 1989, des manifestations éclatent à Timisoara pour empêcher la déportation de Laszlo Tokes, un pasteur protestant. Le mouvement fait boule de neige. L’état d’urgence est décrété mais l’armée se rallie aux insurgés, laissant à elle-même la Securitate, chargée de la protection du président. Ceausescu et son épouse Elena, le vice premier ministre, sont arrêtés, jugés et exécutés. Un Conseil du Front de salut national, présidé par Ion Illescu, prend la direction du pays. Lors des élections du 20 mai 1990, Illescu sera confirmé dans ses fonctions.Shameful but necessary': How the Romanian rulers who starved their people met their end | The Independent | The IndependentFruit de la guerre et de Yalta ImageComme pour nombre de pays de l’Est, l’entrée 44 ans plus tôt de la Roumanie dans la sphère communiste découle de la Seconde Guerre mondiale. Invasion nazie, instauration d’un régime collaborationniste. Résistance. Retournement à la fois intérieur et extérieur. Appui et intervention de l’Armée Rouge. Victoire aux bons soins de l’Union Soviétique de Staline.  Dans la logique du partage de l’Europe – décidé un peu plus tôt à Yalta entre les alliés – le Parti ouvrier roumain (communiste) s’empare du pouvoir en Roumanie en mars 1945. Bien que son roi Michel ait résisté aux nazis, la monarchie est abolie deux ans plus tard. La République populaire roumaine est proclamée le 30 décembre 1947. Elle devient membre du Pacte de Varsovie, alliance militaire autour de l’URSS face à l’OTAN des Occidentaux.  Homme d’appareil d’origine modeste, Nicolas Ceausescu devient Secrétaire général du Parti ouvrier roumain en 1965, à la mort de son prédécesseur. Le titre vaut direction du pays ; ce n’est qu’en 1974 qu’il y ajoute celui de président de la République. D’abord classiquement aligné sur Moscou, son régime, au fil des ans, se distingue des autres pays « satellites » notamment par sa condamnation, en 1968, de l’intervention soviétique en Tchécoslovaquie.Jimmy Carter: Marele conducător Nicolae Ceauşescu, a îndurat multe în trecut, a fost închis, torturat, dar datorită curajului şi a încrederii sale în viitorul ţării a înfăptuit realizări majore. | Nicolae CeauşescuRoumanie : la chute de Ceausescu, le génie des CarpatesImageLe 25 décembre 1989, une révolution sanglante marquait la fin d’une des dictatures les plus délirantes du 20e siècle. En décembre 1989, la Roumanie bascule. Le régime de Nicolae Ceausescu prend fin, entraîné par la chute du mur de Berlin et l’effondrement des démocraties populaires. Contrairement aux autres pays de l’Europe centrale et orientale, la Roumanie vit alors un épisode d’une rare violence. Plus de 1100 morts, 3300 blessés : la révolution de décembre 1989 clôt une décennie noire pour la Roumanie. Le peuple est affamé. En cause, la volonté absurde du président de rembourser intégralement la dette du pays, l’échec des plans quinquennaux. Nicolae Ceausescu a déjà perdu le contrôle sur l’économie du pays. Il va aussi perdre le contrôle politique.The Autobiography of Nicolae Ceauşescu (2010) | MUBIUn pasteur protestant propulsé au rang de catalyseur de la révolution ImageTout commence le 16 décembre dans une ville de l’ouest du pays, Timisoara. Le pouvoir veut muter un pasteur protestant et l’expulser de son église. Trente ans plus tard, László Tőkés se souvient : « Volontairement ou non, je suis devenu un catalyseur des événements révolutionnaires en Roumanie, dans la mesure où je me suis opposé au régime de Ceausescu, à la suppression de mon Eglise et de ma communauté nationale hongroise. Et ensuite, la révolte populaire spontanée de Timisoara a conduit à la révolution roumaine qui a renversé la dictature de Ceausescu ».ImageHomme d’Eglise, appartenant à la minorité hongroise, avec des connexions à l’ouest, László Tőkés est surveillé de près. Mais c’est une figure rassembleuse. Surtout dans une ville multiculturelle comme Timisoara.  Un mois après la chute du mur de Berlin, Radio Free Europe, une station d’information financée par les Etats-Unis choisit de l’interviewer : « Pour le dire très simplement, j’ai parlé du ‘mur du silence’ et j’ai exprimé ma volonté de briser ce mur du silence, c’est ce qui s’est alors passé. Cela faisait près d’un an que je dénonçais cela. »  « Nous étions persécutés par la Securitate, la police secrète. Un de mes amis a probablement été assassiné. L’enquête n’a toujours pas eu lieu. Des membres du conseil paroissial ont été arrêtés. Tout le monde avait peur, tout le monde était persécuté. Mais malgré cette atmosphère d’intimidation et de terreur, ces gens très simples, très croyants, ont eu le courage de protester, de s’opposer à la terrible Securitate, la police secrète du régime communiste roumain. »https://www.politico.eu/wp-content/uploads/2019/12/GettyImages-1189704403-714x499.jpg« Ce c’est qu’il fallait pour lancer le grand mouvement qui s’est emparé de tout le pays et a mené à la chute de Ceausescu. Et je peux vous dire que sans le soutien de la majorité roumaine, nous aurions été liquidés. C’est cet esprit de Timisoara qui a rendu possible d’avoir au moins une chance contre le régime de Ceausescu. »  A Timisoara, témoin de la chaîne humaine qui se déploie autour du domicile de László Tőkés, l’écrivain roumain Claudiu Iordache raconte : « Le 16 décembre, un ami m’apprend au téléphone qu’il se passait quelque chose au centre-ville, à la maison du pasteur Tőkés. Je me rends là-bas, où je rencontre plein d’autres Roumains qui s’étaient rassemblés ».Most Romanians feel they don't know the truth about the 1989 Revolution | Romania InsiderEn l’absence de Nicolae Ceausescu, son épouse Elena qui est aussi vice-présidente ordonne d’ouvrir le feu sur les manifestants. Il y a des morts, plus de 70, mais les médias relaient des témoignages qui gonflent les chiffres des victimes à 4500 tués sur base de bilans approximatifs et non vérifiés.

Bucarest se soulève 

Les informations sur ce qui se passe à Timisoara n’arrivent que vers le 20 décembre à Bucarest, via les ondes de Radio Free Europe ou par des étudiants.Thousands Protest COVID-19 Restrictions in RomaniaA l’époque, Vava Stefanescu, danseuse et chorégraphe, fait partie de l’ensemble de danse de l’armée. Mais ce jour-là, les répétitions sont annulées. Le 21 décembre, c’est l’anniversaire de ses 20 ans. La jeune fille se précipite sur le lieu des manifestations à Bucarest : « Je pensais que Ceausescu n’était pas éternel, contrairement à mes parents. Le ciel était rose bleu. Il faisait chaud dehors… Tout le monde était heureux. On a passé la nuit sur la place du Palais. Pendant la nuit, on se demandait pourquoi on entendait le bruit des tirs mais que personne ne tombait. Jusqu’à ce qu’une balle nous effleure, de tout près. C’était la confusion. Des soldats tiraient sur les gens. Ils leur faisaient peur ».  A Bucarest aussi donc, des tirs contre la foule. Parfois sur de jeunes, très jeunes manifestants. Des étudiants, des lycéens.  Au service militaire à cette époque, mais en permission pour les fêtes, Ion Marin Uta a été mis au courant des événements de Timisoara et décide de rejoindre les manifestants : « Si on ne le fait pas, ce sera comme à Brasov. Deux ans plus tôt, la ville s’était soulevée contre le régime. Mais malheureusement la Securitate a étouffé la révolte. J’ai dit : ‘Non, il faut faire comme à Timisoara et descendre dans la rue’. Mais dans la nuit, face à la place devant l’hôtel Intercontinental, le régime a envoyé la troupe. On a tiré sur les manifestants. Il y a eu des morts et des blessés ».ImageLa peur n’empêche pas la foule de sortir dans la rue  ImageAndrei Birsan était alors étudiant ingénieur et passionné de photographie. Il a été choqué par la violence armée de la révolution, une violence gratuite qui selon lui traduit le mépris des dirigeants communistes de l’époque pour la population.  « Je crois que c’était un des moments les plus émouvants. Je ne peux pas décrire. Fantastiquement émouvant. Libérateur. J’ai senti dès le début qu’il n’y avait pas de marche arrière. On n’avait pas de télévision, pas de téléphone. On n’avait absolument rien. J’étais étudiant. C’était le 21 décembre, je décide d’aller voir un film au centre-ville. Et là, on a entendu comme un vacarme. Je ne savais pas ce que c’était. J’ai demandé à une dame, elle ne savait pas non plus. Je suis parti à la place de l’Université où se passait la première manifestation contre Ceausescu. Je ne me rendais pas compte de ce qu’il se passait. » « Le lendemain, je suis allé voir des collègues de l’université pour prendre une bière. J’ai entendu parler de la révolution. On savait ce qui s’était passé à Timisoara la semaine précédente, mais on ne savait pas ce qui se passait à Bucarest. Je n’avais pas peur même si on tirait autour de nous. Je ne sais pas pourquoi. Parce que ça tirait mais on ne savait pas qui tirait sur qui, même aujourd’hui on ne sait pas. »

Des armes pour les civilsBiggest protest in Romania since Ceausescu was executed | Daily Mail OnlineAndrei Birsan poursuit son récit : « Plus tard ce soir-là, j’ai été à la faculté où des gardes étaient organisées pour protéger la polytechnique contre les terroristes et je suis resté là-bas. On a même reçu des armes. J’ai monté la garde à plusieurs postes mais rien ne s’est passé. En bas, les filles ont organisé un buffet avec de la nourriture. On avait même un sapin de Noel. Je suis resté là jusqu’à ce que Ceausescu soit fusillé. C’était clair qu’on s’y attendait. Tout le monde souhaitait sa mort. Peut-être n’auraient-ils pas dû le faire comme cela, il aurait fallu un procès plus long pour avoir plus d’information. En fait, on ne savait pas si on luttait contre Ceausescu ou contre le communisme, on voulait juste être libre ! ».  Difficile de comprendre ce qu’il se passe. Des armes circulent, c’est clair. Des rumeurs aussi. Elles affirment que des terroristes sont présents. Résultat : ça canarde dans tous les sens. Surtout autour du bâtiment de la télévision, là où travaille à l’époque la journaliste Violetta Oltean : « Le 22 décembre, la sécurité de la télévision s’apprêtait à tirer sur les manifestants qui voulaient se rendre à la télévision. Nous avons jeté des bocaux de yogourt sur les gardes pour défendre les manifestants. Je suis restée jusqu’au 31 décembre à la télévision pour aider les révolutionnaires. La Securitate nous tirait dessus. Nous avons eu des blessés et des morts. C’était le chaos absolu. Finalement, c’est l’armée qui nous a protégés. Les parachutistes sont des héros ».  L’ambassade d’URSS propose même des armes aux employés de la télévision. Des armes sortent aussi de caches préparées par le régime de Ceausescu mais utilisées finalement contre lui par ses anciens camarades communistes qui s’installent au pouvoir à sa place.

Manipulation et récupération Bref, beaucoup de questions restent longtemps sans réponse. Surtout celle-ci : la révolution de 1989 a-t-elle été confisquée ?  Pour Vava Stefanescu, l’idée que la révolution a été volée s’est vite répandue dans les esprits : « J’y ai beaucoup pensé pendant 30 ans. Une manipulation. Pourquoi fallait-il des morts ? Je suis sûre que cela s’est arrangé au niveau international. Ce n’est pas quelque chose qui a été décidé par le peuple roumain ».  Pour certains, le changement a été positif. Mannequin au cours des années 80, Romanitza Iovan a réussi sa reconversion après la révolution de 1989 : « Mais c’est évident que cela nous a changé nos vies la révolution ! C’est incontestable : le changement est énorme. J’avais 25 ans et on se demandait dans quelle période on vivait. J’ai eu de la chance durant ces 25 années, dont environ 6 années très belles grâce à mon métier. Mais le changement était essentiel, car j’ai pu créer ma propre maison de mode, une petite boîte, puis une société immobilière de bureaux : un parcours parfait pour moi et j’espère pour la majorité des Roumains, la révolution est arrivée au bon moment… Et nous a fondamentalement changé nos vies ».

L’exécution de Ceausescu, un procès expéditif 

Après une visite médicale, l’audience commence. Le procès dure moins d’une heure. Il reproduit la procédure utilisée par le régime contre les opposants et les dissidents. Les normes de l’Etat de droit ne sont pas respectées.

Les chefs d’accusation sont nombreux, notamment le génocide. A Timisoara, le bilan de la répression sanglante qui fait 70 morts a été déformé. Il est question de charnier et de milliers de morts, des estimations non vérifiées mais reprises par la presse. Le dossier d’accusation mentionne un génocide ayant fait 60.000 victimes. Les autres chefs d’accusation sont : atteinte au pouvoir de l’État par l’organisation d’une action armée contre le peuple et les pouvoirs étatiques, destruction de biens publics et affaiblissement de l’économie nationale.  Le procureur requiert la peine de mort.  Face à ses juges, Nicolae Ceausescu conteste la légitimité du tribunal. « Un coup monté par des traîtres », dénonce-t-il. Ses avocats se livrent à un véritable réquisitoire contre lui. L’audience est secrète, à huis clos, mais filmée.

Après 10 minutes de délibération, la sentence est sans surprise : la mort et la confiscation de tous leurs biens. A la lecture de la peine, Nicolae Ceausescu proteste véhémentement. Le couple est emmené pour être exécuté dans la cour de la caserne. Nicolae et Elena ne veulent pas avoir les mains entravées et se débattent. Des militaires leur ligotent tout de même les poignets et les emmènent.

Dictateur communiste de Roumanie (1967-89), exécuté

Nicolae Ceausescu (1918-1989), a été chef de l’État roumain de 1965 à 1989 avant d’être renversé par la chute du rideau de fer.  Élu secrétaire général du Parti communiste en 1965, Ceausescu devient ensuite président du Conseil d’État et convertit celui-ci en 1974 en un poste plus dictatorial.  Le régime de Ceausescu était plus modéré dans les premières années et en politique étrangère, il allait parfois à l’encontre des souhaits soviétiques, s’opposant à l’invasion de la Tchécoslovaquie. Cependant, plus tard, il a cherché à imiter les États communistes tels que la Corée du Nord, créant un culte de la personnalité autour de lui et contrôlant la vie culturelle et économique. Le niveau de vie a chuté de façon spectaculaire. La révolution de 1989 a commencé par des manifestations dans la ville de Timișoara et à Bucarest. Ceausescu fut bientôt arrêté et condamné lors d’un procès-spectacle. Lui et sa femme ont été exécutés par un peloton d’exécution le même jour.

Événements historiques

1965-03-22 Nicolae Ceausescu est élu secrétaire général du Parti communiste roumain

1967-12-09 Nicolae Ceaușescu devient président de la Roumanie (renversé en 1989)

1968-08-15 Le président roumain Nicolae Ceausescu visite Prague

1989-12-22 Après 23 ans de régime dictatorial, la Roumanie renverse le dictateur communiste Nicolae Ceausescu

1989-12-25 Procès -spectacle du dictateur communiste roumain Nicolae Ceaușescu et de sa femme Elena pour génocide et enrichissement personnel. Le couple est reconnu coupable et exécuté par un peloton d’exécution le même jour. Communism is alive and well in Romania's leaders – DW – 12/17/2018

https://www.rtbf.be/info/monde/detail_il-y-a-30-ans-le-proces-et-l-execution-de-ceausescu-marquent-le-tournant-de-la-revolution-roumaine?id=10395751

https://information.tv5monde.com/info/roumanie-il-y-trente-ans-la-chute-de-ceausescu-le-genie-des-carpates-337703

https://www.rtbf.be/info/monde/detail_roumanie-1989-l-histoire-d-une-revolution-confisquee?id=10386472

https://perspective.usherbrooke.ca/bilan/servlet/BMEve/162

https://www.onthisday.com/people/nicolae-ceausescu

22 Décembre 1989 – Révolte en Roumanie

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