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NEHRU-Un "autre" regard sur l'Histoire du Monde

20 – La mer d’Arabie

Depuis la prison de quartier Bareilly

http://jaisankarg.synthasite.com/resources/jawaharlal_nehru_glimpses_of_world_history.pdf

// 22 avril 1931 (Page 93- 94 /992) //

Etrange que nous voyagions avec ce bateau – le Cracovia – de Bombay à Colombo ! Je me souviens bien d’avoir attendu l’arrivée du Cracovia à Venise il y a près de quatre ans. Dadu était à bord, et j’étais allé à Venise le rencontrer, tu laissant à ton école à Bex en Suisse. Encore une fois, quelques mois plus tard, c’est par le Cracovia que Dadu est rentré d’Europe et je l’ai rencontré à Bombay. Certains de ses compagnons de voyage sont avec nous maintenant, et ils sont pleins d’histoires sur lui.     55

 

Je t’ai écrit hier au sujet des trois derniers mois de changement. Je voudrais que tu te souviennes d’une chose qui s’est produite au cours de ces dernières semaines, car l’Inde s’en souviendra pendant de longues années. Il y a moins d’un mois dans la ville de Cawnpore est mort un vaillant soldat indien, Ganesh Shankar Vidyarthi, tué alors qu’il cherchait à en sauver d’autres. Ganeshji était un de mes amis très chers, un camarade noble et désintéressé avec qui c’était un privilège de travailler. Lorsque la folie a éclaté à Cawnpore le mois dernier et que l’Indien a tué l’Indien, Ganeshji s’est précipité dans la mêlée, non pour combattre l’un de ses compatriotes, mais pour les sauver. Il en a sauvé des centaines, lui-même il ne pouvait pas sauver, et ne se souciait pas de sauver, et par les mains des personnes mêmes qu’il cherchait à sauver, il a rencontré sa mort. Cawnpore et notre province ont perdu une étoile brillante et beaucoup d’entre nous un ami cher et sage. Mais quelle mort glorieuse était la sienne, alors qu’il affrontait les yeux calmes et sans broncher la folie de la foule, et même au milieu du danger et de la mort, il ne pensait qu’aux autres et comment les sauver !

 

Trois mois de changement ! Une goutte dans l’océan du temps, une seule seconde dans la vie d’une nation. Il y a trois semaines seulement, je suis allé voir les ruines de Mohen-jo Daro dans l’Indusvalley dans le Sind. Tu n’étais pas avec moi là-bas. J’ai vu sortir de terre une grande ville, une ville de maisons en briques solides et de larges voies de circulation, construite, dit-on, il y a 6000 ans. Et j’ai vu de beaux bijoux et des jarres trouvés dans cette ville antique. Je pourrais presque imaginer des hommes et des femmes, vêtus de vêtements gais, marchant dans ses rues et ses ruelles, et des enfants jouant, comme les enfants le feront, et les bazars, pleins de marchandises, et les gens qui achètent et vendent, et les cloches du temple sonnent.

 

Pendant ces 5000 ans, l’Inde a vécu sa vie et a connu de nombreux changements. Et je me demande parfois si cette vieille mère, si ancienne et pourtant si jeune et belle, ne sourit pas de l’impatience de ses enfants et de leurs petits soucis, de leurs joies et de leurs peines, qui durent un jour et puis ne sont plus !

 

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