Comment Mary Ann Shadd Cary a secoué le mouvement abolitionnisteMary Ann Shadd Cary (1823 – 1893) éducatrice, abolitionniste, auteure, éditrice et journaliste, née le 9 octobre 1823 à Wilmington, Delaware, fille d’Abraham Doras Shadd et de Harriet Parnell ; le 3 janvier 1856, elle épousa à St Catharines, Haut-Canada, Thomas Fauntleroy Cary (décédé en 1860), et ils eurent un fils et une fille ; décédée le 5 juin 1893 à Washington.Mary Ann Camberton Shadd était l’aînée des enfants d’un éminent abolitionniste noir. Elle avait dix ans quand sa famille quitta Wilmington pour West Chester, en Pennsylvanie, où elle fit ses études dans un pensionnat quaker. Six ans plus tard, Mary Ann quitta cet établissement et retourna à Wilmington, où elle mit sur pied une école pour les jeunes Noirs. Elle y enseigna d’abord, de 1839 à 1850, puis dans des écoles noires de New York, Trenton au New Jersey, ainsi que West Chester et Norristown en Pennsylvanie. Partout, elle répandait le message de son père : les Noirs pouvaient atteindre la parité raciale, donc s’intégrer à la société américaine, par l’éducation, l’épargne et le labeur. Ces opinions figurent dans Hints to the colored people of the north, opuscule de 12 pages paru en 1849, dans lequel elle soulignait la folie de ceux qui imitaient le matérialisme ostentatoire des Blancs. Militante politique comme son père, Mary Ann implorait les Noirs de prendre l’initiative de la réforme antiesclavagiste sans attendre la bonne volonté ou l’appui des Blancs. Au milieu de la vingtaine, elle avait déjà acquis une renommée considérable en développant les thèmes qui lui resteraient chers : l’indépendance et le respect de soi pour les Noirs.Cependant, Mary Ann Shadd atteignit vraiment la célébrité quand elle devint chef et porte-parole des réfugiés noirs qui avaient fui les États-Unis pour gagner le Haut-Canada après l’adoption du Fugitive Slave Act en 1850. Croyant qu’elle pourrait les aider, elle s’installa à Windsor à l’automne de 1851, et y ouvrit une école avec l’aide de l’American Missionary Association. Ses relations avec les autres leaders noirs du Canada furent d’abord amicales, mais bientôt elle se trouva mêlée à une querelle avec Henry Walton Bibb*. Elle prônait en effet la complète intégration des Noirs et s’opposait aux communautés séparées, comme celles de la Refugee Home Society, auxquelles Bibb était étroitement associé. En outre, elle reprochait à cette société de « mendier » des fonds et en vint même à soupçonner Bibb de retirer un avantage financier de sa participation à la société. Quant à Bibb, il demandait dans son journal, le Voice of the Fugitive, pourquoi elle avait caché aux parents de ses élèves la subvention que lui avait accordée l’American Missionary Association. Cette querelle nuisit aux deux parties ; en janvier 1853, l’association, manifestement opposée aux opinions évangéliques de la jeune femme, cessa de financer son école.Mary Ann Shadd écrivit alors davantage. Pendant l’été de 1852, elle avait publié une brochure, A plea for emigration […], dans laquelle elle encourageait les Noirs américains à immigrer au Canada et attaquait la philosophie de plus en plus séparatiste des Noirs canadiens. Cette publication connut une large diffusion, mais Mary Ann voulait un organe régulier pour répandre ses vues. Au début de 1853, grâce à l’aide opportune de l’abolitionniste noir Samuel Ringgold Ward*, elle lança le premier numéro du Provincial Freeman. Officiellement rédacteur en chef de cette publication audacieuse, Ward n’avait en fait que prêté son nom afin de soulever l’intérêt des lecteurs et d’attirer des abonnés. Mary Ann Shadd n’avait ni titre ni poste officiel, mais elle était l’âme de la nouvelle entreprise. Le premier numéro, résolument intégrationniste, parut en mars. Ensuite, on suspendit la publication pendant un an, en raison de la tournée de conférences que fit la jeune femme aux États-Unis et au Canada afin de recueillir des fonds pour le nouveau journal.Dès mars 1854, Mary Ann Shadd avait trouvé suffisamment d’appuis pour relancer le Provincial Freeman, dont la devise était : L’autonomie seule peut mener à l’indépendance. Installé à Toronto, le journal parut régulièrement. Mary Ann y commentait tous les aspects de la vie des Noirs au Canada, mais elle s’attardait surtout aux problèmes de discrimination et de ségrégation raciale. Elle attaquait quiconque, Noir ou Blanc, était disposé à faire un compromis avec les esclavagistes et stigmatisait surtout ceux de ses frères noirs qui étaient prêts à accepter un statut de deuxième classe. Toutefois, ses invectives les plus féroces allaient aux communautés séparées, qui selon elle ne faisait que favoriser la discrimination, et elle pressait les Noirs de tenter de s’intégrer à la société canadienne. Elle critiquait John Scoble et Josiah Henson, du village de Dawn, presque aussi sévèrement que Bibb, et n’admettait qu’à contrecœur les qualités de la communauté d’Elgin, dirigée par William King.Des problèmes financiers interrompirent la publication régulière du Provincial Freeman plusieurs fois. Le 30 juin 1855, William P. Newman devint rédacteur en chef et le journal s’installa à Chatham, mais Mary Ann Shadd peut avoir continué d’y jouer un rôle d’arrière-plan. En janvier 1856, elle épousa l’homme d’affaires noir Thomas Fauntleroy Cary ; en mai, elle retourna au Provincial Freeman pour occuper l’un des trois postes de rédacteur. Cependant, le journal ne parut que sporadiquement à compter de 1856, et il ferma ses portes en 1859 ; le fardeau financier était devenu trop lourd.Après la disparition du Provincial Freeman, Mary Ann Shadd demeura à Chatham et recommença à enseigner. Toutefois, elle suivait avec grand intérêt la polarisation de l’opinion américaine. L’arrivée de John Brown au Canada, au printemps de 1858, avait renforcé son espoir de voir le conflit imminent mettre fin à l’esclavage. Elle faisait partie d’un groupe qui rencontra Brown et fut mise au courant des projets de ce visionnaire. Un autre membre du groupe, le jeune Noir Osborne Perry Anderson, fut si enthousiasmé par Brown qu’il le suivit à Harpers Ferry en octobre 1859. Il survécut à la bataille et raconta ses souvenirs dans A voice from Harper’s Ferry […], que Mary Ann Shadd prépara pour la publication en 1861.Pendant les premières années de la guerre de Sécession, Mary Ann Shadd continua d’enseigner dans une école interraciale à Chatham, mais elle finit par en avoir assez de suivre le conflit de loin. À la fin de 1863, impatiente de participer à l’effort de guerre des Nordistes, elle accepta, comme Martin Robinson Delany le lui demandait, d’être agente de recrutement. Rentrée aux États-Unis, elle participa aux programmes d’enrôlement de plusieurs États. Après la bataille d’Appomattox ; elle se demanda vraiment si elle devait demeurer aux États-Unis ; elle y réfléchit longtemps et en vint à la conclusion, que le meilleur moyen de servir son peuple était de rester et d’aider à l’éducation et à l’intégration des millions de Noirs nouvellement émancipés. À cette fin, elle obtint en juillet 1868 un certificat d’enseignement américain et enseigna quelque temps à Detroit avant de se fixer à Washington. Elle gagna sa vie en enseignant et obtint finalement un diplôme de droit de la Howard University en 1883.Mary Ann Camberton Shadd continua de militer pour les droits civils et l’égalité des droits. Elle ne revint au Canada que peu de temps, en 1881, pour organiser un ralliement en faveur du suffrage féminin. Atteinte de rhumatisme et de cancer, elle mourut pendant l’été de 1893.
Suffragette et éditrice Mary Ann Shadd CarySuffragiste, écrivain et militant anti-esclavagiste, la première lettre publiée de Shadd Cary était adressée à son collègue abolitionniste et homme d’État afro-américain Frederick Douglass, préconisant que :
« Nous devrions faire plus et parler moins… Nous organisons des conventions depuis des années. – nous nous sommes rassemblés et nous nous sommes plaints de nos difficultés et de nos afflictions, en passant des résolutions sur des résolutions dans une certaine mesure, mais il semble vraiment que nous n’ayons fait que peu de progrès compte tenu de nos résolutions. »
Shadd Cary était une femme de nombreuses premières ; elle a été la première femme noire en Amérique du Nord à publier un journal (The Provincial Freeman) et l’une des premières avocates noires aux États-Unis.« Nous devrions faire plus et parler moins. »
C’est le message que Mary Ann Shadd Cary, 25 ans, a écrit dans une longue lettre de 1848 à l’abolitionniste et homme d’État afro-américain Frederick Douglass, qui avait demandé aux lecteurs de son journal North Star des suggestions pour améliorer la vie des Noirs en Amérique.
Shadd Cary, une femme avide de changement, a exigé de l’action, pas de la rhétorique.Douglass a imprimé la lettre, une critique sans vergogne du mouvement abolitionniste établi dominé par les hommes et de sa propension au discours interminable, et elle est devenue le premier ouvrage publié de Shadd Cary. Bien que cela l’ait mise en désaccord avec certains membres de la génération plus âgée, cela l’a également établie comme une voix jeune et non conventionnelle, et a été la première étape de son parcours pour devenir une journaliste et militante de premier plan.
« C’était sans peur et c’était féroce », Jane Rhodes, directrice du département d’études afro-américaines de l’Université de l’Illinois à Chicago et auteure de » Mary Ann Shadd Cary : The Black Press and Protest in the Nineteenth Century « . » (1999), dit de la lettre.
« Elle n’avait vraiment pas peur et elle l’a porté tout au long de sa vie », a déclaré Rhodes.Shadd Cary a été la première femme noire en Amérique du Nord à éditer et publier un journal, l’une des premières avocates noires aux États-Unis et un défenseur de l’octroi du droit de vote aux femmes.
L’Amérique dans laquelle Shadd Cary est né n’était qu’à quelques décennies de la guerre civile. Des centaines de milliers de Noirs américains ont été réduits en esclavage dans le Sud, et bien qu’elle-même soit libre, le fait d’être jeune, noire et de sexe féminin fait d’elle une partie de l’un des groupes les plus marginalisés du pays.
Née le 9 octobre 1823 à Wilmington, Del., elle était l’aînée de 13 enfants élevés dans une maison qui servait souvent de refuge aux esclaves fugitifs. Ses parents, Abraham Doras Shadd et Harriet Parnell, étaient abolitionnistes, mais même en tant que Noirs libres vivant dans le Nord, ils étaient confrontés à une discrimination et une ségrégation profondes.Parce que les enfants noirs n’étaient pas autorisés à être éduqués dans le Delaware, ses parents ont déménagé la famille en Pennsylvanie en 1833. Après avoir terminé ses études dans un pensionnat Quaker, Shadd Cary est devenue enseignante.
En 1850, lorsque le Congrès a adopté le Fugitive Slave Act – qui obligeait les Américains à aider à la capture d’esclaves en fuite et imposait de lourdes sanctions à ceux qui ne s’y conformaient pas – Shadd Cary et quelques autres membres de sa famille ont quitté les États-Unis pour le Canada.
Elle considérait cette décision comme politique et elle croyait qu’elle aurait une plus grande liberté pour continuer à se battre pour la cause abolitionniste de l’autre côté de la frontière.Elle a publié plusieurs articles qui présentaient le Canada comme un refuge sûr pour les anciens esclaves et les Noirs libres, y compris une brochure, « Notes of Canada West », qui détaillait où les Noirs américains devraient s’installer et ce à quoi ils pouvaient s’attendre, et les exhortait à faire le voyage vers le nord. .
« Bien éduquée, vive, avec une détermination qui brillait de ses yeux perçants, elle s’est lancée seule dans le grand pèlerinage canadien lorsque des milliers d’hommes noirs chassés se sont précipités vers le nord et se sont glissés sous la protection de la patte du lion », a écrit WEB Du Bois à propos de Shadd Cary 30 ans après sa mort dans un essai intitulé « La damnation des femmes ».
En 1853, Shadd Cary fonde The Provincial Freeman, un journal publié initialement à Windsor, en Ontario, puis à Toronto et à Chatham, en Ontario. « Consacré à l’antiesclavagisme, à la tempérance et à la littérature générale » était le slogan.Son approche progressiste et ses perspectives peu orthodoxes ont aliéné certaines personnes. Elle a critiqué les abolitionnistes qui ne se sont pas battus pour la pleine égalité et ont plutôt soutenu les écoles et les communautés ségréguées. Elle a également dénoncé les associations de réfugiés qui collectaient des fonds pour soutenir les esclaves fugitifs mais fermaient les yeux sur les Noirs libres contraints de vivre dans la pauvreté.
Un critique d’un journal rival, mécontent de son point de vue, a écrit : « Miss Shadd a dit et écrit beaucoup de choses qui, selon nous, n’ajouteront rien à son crédit en tant que dame. »
Mais Shadd Cary était moins soucieuse d’être une femme que d’avoir une voix.« Elle a reçu beaucoup de critiques de la part de dirigeants masculins noirs, même de certaines femmes noires, parce qu’elle était si visible et si vocale », a déclaré Rhodes, l’historien, notant que Shadd Cary a défié les attitudes traditionnelles en supposant que la place d’une femme était dans la maison. Et elle a dit : « Je t’ouvre la porte, aux femmes noires, et je suis fière de le faire et j’essaie de créer un espace pour que tu puisses avoir une voix. »
Au grand risque personnel, elle a également ramené son journal et son message de l’autre côté de la frontière en Amérique.
Elle montait à cheval ou prenait une diligence dans différentes communautés et parlait de la vie au Canada, puis elle recueillait des abonnements pour payer le journal.
Elle épousa Thomas F. Cary, un barbier à Toronto, en 1856. Il mourut quatre ans plus tard, alors qu’elle était enceinte de leur deuxième enfant, Linton. Leur premier enfant était une fille, Sarah Elizabeth.
Finalement, The Provincial Freeman est devenu financièrement insoutenable et il a cessé de paraître en 1859. Mais le travail de plaidoyer de Shadd Cary s’est poursuivi pendant qu’elle enseignait dans une école intégrée à Chatham.
Lorsque la guerre civile a commencé, Shadd Cary est retourné en Amérique et a recruté des Noirs du Nord pour se battre pour l’armée de l’Union. Elle s’installe à Washington après la guerre et fonde une école pour les enfants d’esclaves affranchis, estimant que l’éducation leur offre plus d’opportunités.
En 1870, elle est diplômée de l’Université Howard avec un diplôme en droit.
Elle s’est ensuite lancée dans le mouvement pour le suffrage, s’adressant au Comité judiciaire de la Chambre en janvier 1874 dans le cadre d’un groupe de femmes demandant le droit de vote.
« Je ne suis pas assez vaniteuse pour supposer un instant que mes paroles pourraient ajouter un iota de poids aux arguments de ces femmes savantes et sérieuses », a-t-elle commencé, mais a ensuite détaillé comment, en tant que « femme de couleur » et pourtant » une habitante de ce quartier, une contribuable », elle n’a obtenu qu’une partie des droits de ses homologues masculins.
Il faudra de nombreuses années avant que les femmes n’obtiennent le droit de vote. Et malgré sa vie qui a brisé les barrières, l’héritage de Shadd Cary s’est largement estompé dans les décennies qui ont suivi sa mort le 5 juin 1893.
Même dans les domaines qu’elle a contribué à façonner par sa ténacité et sa force de volonté – le mouvement abolitionniste de sa jeunesse, où ses idées progressistes ont suscité la colère, et, plus tard, le mouvement pour le suffrage, où les femmes noires étaient souvent marginalisées- elle était à la fois une puissante force et une femme marginale.
« Cette contradiction apparente – que Shadd Cary serait considéré à la fois comme un objet de respect et de leadership et comme un objet de dérision », a écrit Rhodes dans l’avant-propos de sa biographie, « est au cœur de l’histoire de la femme afro-américaine ».
Événements historiques1853-03-24 Journal anti-esclavagiste « The Provincial Freeman » publié pour la première fois à Windsor, en Ontario, édité par Samuel Ringgold Ward et Mary Ann Shadd Cary, première femme noire éditrice en Amérique du Nord
https://www.nytimes.com/2018/06/06/obituaries/mary-ann-shadd-cary-abolitionist-overlooked.html
http://www.biographi.ca/fr/bio/shadd_mary_ann_camberton_12E.html
https://www.feministsforlife.org/herstory-mary-ann-shadd-cary/