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15 mars 1921 – Talaat Pacha fut assassiné à Berlin

ImageGénocide arménien : qui était Talaat Pacha, le « Hitler turc » ?Fédaïs arméniens — WikipédiaPour la première fois dans l’Histoire, la notion de crime d’Etat a été évoquée devant une cour pénaleAucune description de photo disponible.Talaat Pacha (1874-1921) fut l’un des trois dirigeants Jeunes-Turcs au crépuscule de l’empire ottoman et le responsable en chef du génocide arménien. Il s’enfuit à Berlin lorsque les Alliés furent proches de la victoire durant la Première Guerre mondiale. Les cours martiales qui se tinrent dans Constantinople occupée, en 1919 et 1920, le condamnèrent, ainsi que d’autres hauts officiels, à mort par contumace pour son rôle dans les crimes atroces perpétrés en particulier contre les Arméniens et les autres sujets chrétiens ottomans. Mais ces condamnations ne furent pas appliquées par ces tribunaux et, très rapidement, le mouvement révolutionnaire dirigé par Mustafa Kemal rattrapa les poursuites.Talaat Pacha — WikipédiaLes puissances occidentales s’accordèrent par la suite avec le nouveau gouvernement turc, installé désormais à Ankara. Or les Arméniens ne laissèrent pas tomber à l’eau ces verdicts. L’opération appelée Némésis veilla à la traque et à l’assassinat de plusieurs hauts responsables, ayant contribué à la mise en œuvre du génocide arménien. L’assassinat le plus retentissant – à coup sûr le plus sensationnel – fut peut-être celui de Talaat Pacha, tué en plein jour à Berlin, le 15 mars 1921.ImageSoghomon Tehlirian fut celui qui appuya sur la gâchette. Comme beaucoup de ses compatriotes, il avait été témoin des atrocités de 1915, voyant sa famille massacrée sous ses yeux, lui-même étant laissé pour mort. Ayant réussi à survivre et rejoint les rangs de la Fédération Révolutionnaire Arménienne, Tehlirian acquit une certaine expérience au combat et s’entraîna avant d’être impliqué dans des plans secrets d’assassinats. Il arriva en Allemagne, s’établit là où Talaat Pacha habitait à Berlin et, après quelques enquêtes, mena à bien sa mission.

Il s’agissait notamment d’être pris, d’avoir un procès et d’en susciter la couverture. Toute cette affaire fut un événement majeur à l’époque, non seulement parce qu’elle mettait en lumière les réalités du génocide arménien qui étaient lentement, mais sûrement, reléguées – en particulier en Allemagne même, où les informations relatives à ces massacres dans un pays allié n’avaient pas été librement diffusées durant la guerre – mais aussi, parce que, finalement, Soghomon Tehlirian fut acquitté pour ce crime. Tehlirian, le procès d'un génocide | CNRS Le journalNul ne nia, ni ne mit en doute qui avait tué qui et comment. Mais après avoir été exposé à toute cette histoire – la transcription s’étale sur des pages et des pages, détaillant l’expérience terrible de Tehlirian et son état mental qui s’ensuivit – le jury préféra laissa partir Tehlirian. Il va sans dire que l’affaire suscita une immense indignation et procura un sentiment intense de vengeance parmi les Arméniens déjà dispersés à travers le monde. Tehlirian vécut ensuite en Serbie, avant de s’installer finalement en Californie, où il mourut en 1960. Il est enterré à Fresno, au cimetière Ararat, sous un obélisque dominé par un aigle aux ailes déployées attaquant un serpent. Les restes de Talaat Pacha furent transférés par les nazis à Istanbul en 1943, où il fut enterré avec tous les honneurs dans un monument national qui existe toujours.Talaat PachaL’opération Nemesis : Talaat, Tehlirian et la poursuite de la justice                                                                     ImageLe 15 mars 1921, à Berlin, Soghomon Tehlirian a assassiné Talaat Pacha. « C’est comme si un juif avait eu la chance de mettre une balle dans la tête d’Adolf Hitler », affirme avec fermeté le géopolitologue Gérard Chaliand au sujet de cet événement lié au génocide arménien de 1915. En automne 1921, Berlin était le théâtre d’un procès criminel qui devait entrer dans l’histoire. L’Arménien Soghomon Tehlirian a été jugé pour le meurtre de Talaat Pacha, qu’il a abattu le 15 mars 1921 en plein jour. Talaat était l’ancien ministre de l’Intérieur du régime des Jeunes Turcs qui avait orchestré et dirigé le génocide contre 1,5 million d’Arméniens et d’innombrables autres minorités chrétiennes.ImageAu cours de la dernière semaine d’octobre 2021, un groupe de militants des droits de l’homme, d’historiens, d’acteurs, de musiciens et de juristes s’est réuni pour commémorer ces événements historiques, retraçant les pas et les actions des protagonistes, pour réfléchir sur leur importance dans le développement des concepts fondamentaux de la loi internationale.Le génocide arménien : l'extermination (1/3)Le Groupe de travail Reconnaissance – Contre le génocide, pour la compréhension entre les peuples (AGA) a organisé la commémoration en trois événements les 24, 26 et 29 octobre :See captionLe premier était une visite guidée par la spécialiste du génocide et présidente de l’AGA, Tessa Hofmann, dans la Hardenbergstrasse, la rue à Berlin où Tehlirian avait tiré et tué Talaat ;

La seconde comportait une conférence de Hofmann sur l’importance du procès ultérieur dans l’histoire du droit, accompagnée de lectures des témoignages du procès et d’œuvres littéraires traitant du génocide arménien.Albert Herszkowicz (@albertHerszkow1) / TwitterL’événement final était une reconstitution condensée du procès, tenue dans le même palais de justice où la procédure judiciaire s’était déroulée.Armenian deportatees from Erzurum walking along dirt roadSoghomon Tehlirian, le bras de la vengeance Véronique Chemla: « La vengeance des Arméniens. Le procès Tehlirian », de Bernard GeorgeLes locaux du journal Djagadamard, à Constantinople, servent de bureau de recrutement des volontaires. Ils ne manquent pas. Tous ont perdu des membres de leur famille dans le génocide, tous sont des combattants aguerris. Certains issus de la résistance sur le territoire ottoman. A tous, il est demandé de conserver les armes qu’ils possèdent et de se tenir disponible en permanence pour un acte de justice. Tous ont soif de vengeance. Soghomon Tehlirian, 23 ans, est l’un d’eux. Sa famille a péri pendant qu’il se battait contre les Turcs dans le Caucase, dans un bataillon de l’armée russe. Photograph of the bodies of dozens of Armenians in a fieldA Constantinople, il a déjà exécuté de son propre chef Haroutioub Meguerditchian, l’un des principaux agents arméniens de Talaat Pacha au ministère de l’Intérieur. Convoqué par Armen Garo à Boston, Tehlirian se voit notifier sa mission : tuer Talaat Pacha, cible prioritaire localisée dans la capitale allemande grâce à Hratch Papazian, une taupe infiltrée sous le faux nom de Mehmed Ali dans la communauté des Jeunes-Turcs en exil à Berlin.14, des armes et des motsTehlirian gagne l’Allemagne à son tour, se fait passer pour un étudiant et se met en contact avec le commando berlinois. Car l’assassinat de l’objectif numéro un est un travail d’équipe dont Tehlirian n’est que le bras armé. De fausses pistes en heures d’attente devant une adresse erronée, la traque est longue. Phototgraph of the courthouse where Tehliran's trial was heldEnfin, un homme, correspondant à la description de l’ex-grand vizir, est repéré à la gare de Berlin. Telhirian, qui s’est procuré une photographie de l’ex-grand vizir, gratte la moustache et le fez sur le cliché pour mieux l’identifier. Le résultat correspond à l’individu qu’il a suivi jusqu’au 4 Hardenberstrasse. Photograph of two Russian soldiers in a ruined village looking at skeletal remainsAvec l’accord du commando, il déménage dans un appartement en face pour ne plus quitter des yeux les allées et venues de sa cible. Le 15 mars 1921, Tehlirian passe à l’action et abat Talaat Pacha. Il comparaît devant la justice du Reich moins de trois mois plus tard, les 2 et 3 juin 1921.Photograph of gravestones in the cemetery of the Şehitlik Mosque in Berlin Au président du tribunal qui l’interroge, Soghomon Tehlirian, passible de la peine de mort s’il est avéré qu’il a prémédité son crime, assure avoir obéi à une voix intérieure pour exécuter sa victime. Conseillé par son avocat missionné par le parti Dachnnak, il invente avoir assisté au massacre de sa mère à Erzindjan et prétexte un message d’outre-tombe qu’elle lui aurait délivré : «Tu as vu, Talaat est ici, et tu restes indifférent ? Tu n’es plus mon fils.»ImageSoghomon Tehlirian est acquitté  ImageDevant une salle bondée, le procès dure deux jours. Les témoins se succèdent. La plupart pour éclairer l’ampleur des massacres de 1915 en Arménie et la responsabilité de la victime. Pour preuve, notamment, une correspondance diplomatique et des télégrammes chiffrés ( appelés les «documents Andonian») produits par la défense pour mettre en lumière le rôle des Jeunes-Turcs. Photograph of the building where the assassination took placeCe n’est plus le procès de Soghomon Tehlirian mais celui de feu Talaat Pacha. Le but est atteint. Passée sous silence depuis l’hécatombe de 1915, la cause arménienne occupe le devant de la scène. A l’issu des débats, Soghomon Tehlirian est acquitté en raison. Pour la première fois dans l’Histoire, la notion de crime d’Etat a été évoquée devant une cour pénale. Des débats et plaidoiries dont le juriste Raphael Lemkin s’inspirera pour définir la notion de génocide qui servira à établir la culpabilité des principaux responsables du IIIe Reich jugés à Nuremberg en 1945 et 1946 pour l’holocauste imaginé par les nazis sur le modèle de la solution finale de Talaat Pacha envers les Arméniens.

https://www.geo.fr/histoire/genocide-armenien-qui-etait-talaat-pacha-le-hitler-turc-194459

https://mirrorspectator.com/2021/11/25/talaat-tehlirian-and-the-pursuit-of-justice/

http://100ans100faits.fr/facts/talaat-pacha-fut-assassine-berlin-le-15-mars-1921/

  

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