Lascaux, la divine surprise de septembre 1940À la recherche de leur chien fugueur, quatre jeunes gens découvrent une grotte préhistorique sur la commune de Montignac en Dordogne, France. Les parois et le plafond de la grotte offrent des chefs-d’œuvre de l’art paléolithique datant de 15 000 à 17 000 ans et pour la plupart représentant des animaux. Pour en voir et en savoir plusLe 12 septembre 1940, quatre copains âgés de 13 à 18 ans, et y découvrent l’un des trésors de l’humanité : la célèbre grotte de Lascaux ! Simon Coencas, est décédé le 2 février 2020 à l’âge de 93 ans. Avec Marcel Ravidat, Georges Agniel et Jacques Marsal, il avait découvert la grotte de Lascaux en « explorant un trou » sur une colline dominant le village de Montignac, en Dordogne. Si le site est désormais inaccessible au public, une version moderne, parfait fac-similé de la grotte, a été inaugurée en 2016. C’est une colline qui fait le dos rond. Un aimable promontoire verdoyant d’à peine 215 m d’altitude, dont le relief s’étire sur deux kilomètres le long de la rive gauche de la Vézère (Dordogne). Coiffée de taillis de châtaigniers et de grands pins, il en émane de douces senteurs de girolles. Pourtant, cette colline n’a rien d’ordinaire. Ses entrailles de calcaire – des formations karstiques façonnées il y a des millions d’années – recèlent en effet l’un des trésors de l’humanité : la célèbre grotte de Lascaux.Une «chapelle Sixtine» 17 fois millénaires, où les occupants du paléolithique ont fait courir sur la roche, en d’immémoriales cavalcades d’ocre et de manganèse, des troupeaux d’aurochs, de bouquetins, de bisons, de cervidés et de chevaux. Soit 600 peintures, 400 signes géométriques et 1500 gravures ! En décembre 2016, le site a connu une agitation toute particulière. Un nouveau fac-similé des célèbres peintures – le troisième ! – destination des touristes du monde entier a ouvert ses portes. Objectif : soulager encore la colline d’une trop grande affluence qui menace toujours la grotte d’origine – fermée au public en 1963 – malgré l’ouverture en 1983 d’une première réplique, Lascaux II, située… à 200 mètres à peine.De graves aléas ont failli altérer les peintures pariétales de Lascaux Car les experts se sont rendu compte que les aménagements nécessaires à l’accueil des 270.000 visiteurs annuels de Lascaux II ont à leur tour fragilisé le site inscrit au patrimoine mondial de l’humanité. Il était urgent et impératif de détourner encore le flux : Lascaux IV a donc été bâti en lisière de la petite cité périgourdine de Montignac pour cantonner voitures, cars et visiteurs le plus loin possible. La colline est en effet désormais « sanctuarisée ».Une décision qui doit beaucoup à la création en 2010 du Comité scientifique de la grotte de Lascaux, dirigé par Yves Coppens, le spécialiste de l’évolution humaine. Pour comprendre les enjeux, il faut en effet rappeler les graves aléas qui, à l’orée des années 2000, ont failli altérer à jamais les peintures pariétales avec l’apparition sur les parois de la grotte d’une virulente prolifération fongique et microbienne.Des moisissures blanches (Fursarium solani), associées à la bactérie Pseudomonas fluorescens, ont alors envahi le sas d’entrée, puis des galeries. Pis ! Aucun traitement n’étant venu à bout des moisissures, des champignons noirs ascomycètes (Ochroconis lascauxensis) ont à leur tour fait leur apparition en 2006. La communauté scientifique crut revivre un cauchemar : celui de l’attaque des parois par les algues vertes engendrées par le gaz carbonique rejeté par les visiteurs, qui avait conduit à la fermeture de la grotte en 1963. L’hebdomadaire américain Time fit alors planer la menace d’une possible inscription de la grotte de Lascaux sur la liste des sites du patrimoine en péril de l’Unesco !Un comité scientifique coordonne les études Un électrochoc qui a débouché sur la création du Comité scientifique. Dès lors, le changement a été total. Plus question pour Yves Coppens, en collaboration avec la conservatrice Murielle Mauriac, de considérer la grotte comme un isolat : c’est désormais la colline dans son entier, et l’ensemble de son écosystème, qu’il s’agit d’étudier en association avec des archéologues, géologues, microbiologistes, hydrogéologues, pédologues et climatologues spécialistes des milieux souterrains. «Il fallait enfin sortir de la grotte pour comprendre ce qui s’y passe ! Étudier la colline, la terre, l’eau et la végétation qui la couvre», affirme ainsi Yves Coppens. Résultat : depuis 2013, les programmes se succèdent, comme celui chapeauté par Laurent Bruxelles, géomorphologue de l’Inrap, rattaché au Laboratoire Trace de Toulouse (CNRS), qui coordonne l’étude géologique de la colline.Et les premiers résultats ne se sont pas fait attendre. «Nous avons pu élucider la façon dont l’eau continuait à s’infiltrer dans la cavité. Pendant des années, les recherches s’étaient concentrées à la verticale de la grotte, or ce sont les pénétrations latérales qu’il fallait aussi comprendre », explique le géologue. Ce sont elles qui continuent en effet à « nourrir » les micro-organismes parasites sur les parois en apportant des matières organiques et des éléments chimiques depuis la surface. Laurent Bruxelles et son équipe ont également mis en exergue le rôle dévastateur joué par les différents aménagements créés depuis la découverte de la grotte. «En moins d’un siècle, la cavité et son environnement ont été plus déséquilibrés qu’en 17.000 ans auparavant », déplore-t-il. Ainsi d’énormes cavités ont été creusées dans les années 1950 par Roger Constant pour tenter de retrouver la véritable entrée de Lascaux. Des années durant, cet habitant de la colline a retiré des centaines de tonnes de sédiments constitués par le sable désagrégé des calcaires du crétacé, mettant le site partiellement à nu. « Paradoxalement, ces travaux nous servent aujourd’hui de modèle pour comprendre la composition du massif karstique et la façon dont fonctionnait la cavité, poursuit Laurent Bruxelles. La grotte de Lascaux est en fait une sorte d’îlot de calcaire cerné de poches de sable. Lorsque celles-ci sont remplies par les eaux de surface, elles gonflent comme des éponges et finissent par se déverser dans la cavité.»Un nouveau phénomène pour l’instant sans danger
En marge de ces études, un deuxième programme de recherche est en cours. Il concerne un nouvel et énigmatique phénomène appelé « vermiculations ». D’étranges formations en « agrafe » ont en effet été retrouvées par milliers sur certaines parois de Lascaux, formant des sortes d’agrégats composites mêlant minéraux et matière organique. « C’est un phénomène qui semble dépendre à la fois de facteurs physico-chimiques et microbiologiques, explique Pierre-Yves Jeannin, directeur de l’Institut suisse de spéléologie et de karstologie (ISSKA), en charge de cette étude. Nous n’en connaissons pas clairement les causes ni les conditions dans lesquelles ils se forment. » Le spécialiste se veut cependant rassurant : «Il n’y a pas de danger particulier pour l’instant à Lascaux, aucune n’ayant atteint les œuvres. Il est juste nécessaire de prendre des mesures pour prévenir d’éventuelles évolutions.» Pour l’heure, ces phénomènes sont étudiés à l’intérieur de grottes voisines vierges de toute œuvre pariétale et situées dans les mêmes niveaux géologiques, ainsi que dans celle de Rouffignac. Lascaux, elle, reçoit la visite chaque semaine de deux agents chargés de sa surveillance, seuls habilités à pénétrer dans le sanctuaire préhistorique où, pour l’heure, les taches noires semblent avoir cessé de progresser.PATRIMOINE
Lascaux IV, le nouveau fac-similé Immersion totale garantie ! Depuis le 15 décembre 2016, Lascaux IV, le nouveau Centre international de l’art pariétal, a ouvert ses portes en lisière de la petite cité périgourdine du Montignac. Là, dans un élégant bâtiment blanc semi-enterré, est désormais présentée l’intégralité des chefs-d’œuvre des chasseurs magdaléniens. Une différence fondamentale par rapport à Lascaux II, la première copie inaugurée en 1983, qui ne reproduisait que la salle des Taureaux et une galerie baptisée « diverticule axial » ; et par rapport à Lascaux III, la version itinérante et en « kit » de la grotte ornée. Les 575 m² de peintures et gravures de Lascaux IV ont été reproduits strictement à l’identique par l’Atelier des fac-similés du Périgord (AFSP). Ce clone a été reconstitué dans un monde souterrain, où ont aussi été simulées les conditions d’éclairage d’il y a 20.000 ans ainsi que l’odeur des pierres. Un challenge technologique et scientifique de plus de 57 millions d’euros porté principalement par la région Nouvelle-Aquitaine, le conseil général de la Dordogne, et l’Union européenne, pour ce chantier hors norme de 8800 m² au total.
Car Lascaux IV comprendra d’autres pôles dont quatre salles supplémentaires qui permettront aux visiteurs, grâce à l’usage d’équipements interactifs, de compléter leurs connaissances. Des visites virtuelles d’autres grottes ornées inaccessibles comme Cussac, en Dordogne, ou Cosquer, la cavité sousmarine située dans les calanques près de Marseille, seront aussi possibles. Ainsi que des confrontations artistiques entre les œuvres de la préhistoire et des artistes contemporains dans des salles d’exposition. De son côté, Lascaux II ne sera pas pour autant fermé. Soulagée du trop grand nombre de visiteurs, elle devrait encore accueillir quelques groupes.
Un chien découvre la grotte de l’Antiquité
12 septembre 1940 – Un adolescent français promenait son chien ce jour-là – un simple événement quotidien, mais qui devait conduire à l’une des découvertes archéologiques les plus étonnantes de tous les temps. Marcel Ravidat, un apprenti garagiste de 18 ans, a emmené son chien, Robot, dans les collines près de chez lui à Montignac, en Dordogne, dans le sud-ouest de la France. Là, l’histoire raconte, Robot a couru dans un trou créé par un arbre tombé. Ravidat a jeté des pierres dans le trou et a été surpris qu’elles semblent descendre très, très loin.
De retour avec quelques amis et un professeur, il descendit le trou et commença à explorer. Les garçons ont découvert ce qui allait devenir célèbre sous le nom de peintures rupestres de Lascaux – estimées entre 17 000 et 20 000 ans et décrites avec enthousiasme par les experts comme « le berceau de l’art ». Dans un complexe de grottes disposées autour d’une grotte principale d’environ 20 mètres de long et de cinq mètres de haut se trouvaient ce qui s’est avéré être plus de 2 000 images peintes et gravées d’animaux et de symboles abstraits. Une couche protectrice de craie avait rendu les grottes étanches, permettant à l’œuvre d’être remarquablement préservée dans des noirs, des bruns, des rouges et des jaunes vibrants. Les peintures sont presque toutes des animaux. Il n’y a qu’un seul humain et pas de fleurs, d’arbres ou de campagne. La signification de la plupart des symboles abstraits est inconnue. Le complexe de grottes a été ouvert au public en 1948 et a rapidement attiré environ 1 200 visiteurs par jour. Et c’est là que les problèmes ont commencé.
En 1955, le dioxyde de carbone de l’haleine des visiteurs, ainsi que la chaleur et l’humidité ont fait des ravages sur les peintures. Et l’introduction de la climatisation a apporté avec elle des champignons et des lichens.En conséquence, le complexe a été fermé au public en 1963, les images préhistoriques revenant à l’obscurité et à l’isolement qu’elles avaient connus pendant des milliers d’années. L’intérêt du public n’a cependant pas diminué et a conduit en 1983 à l’ouverture de Lascaux II, une réplique de grotte méticuleusement créée.
Son principal attrait est la Salle des Taureaux. Parmi les quatre grands taureaux noirs qui s’y trouvent, l’un mesure plus de cinq mètres (17 pieds) de long – la plus grande peinture animalière dans les peintures rupestres préhistoriques du monde. M. Ravidat est devenu un gardien officiel de la grotte et un guide qui n’a jamais perdu son émerveillement initial devant les sites qu’il avait été le premier à voir. Il est décédé en 1995, à l’âge de 72 ans, des suites d’une crise cardiaque. Lascaux est devenue un site du patrimoine mondial de l’UNESCO en 1979. À seulement quelques centaines de mètres de la grotte d’origine, Lascaux II est une réplique pratiquement identique avec 80 % des images originales reproduites. Il attire environ 250 000 visiteurs par an.
https://www.sciencesetavenir.fr/archeo-paleo/archeologie/lascaux-la-colline-sanctuarisee_108401
https://www.franceinter.fr/emissions/le-vif-de-l-histoire/le-vif-de-l-histoire-10-septembre-2020
https://www.franceinter.fr/emissions/le-vif-de-l-histoire/le-vif-de-l-histoire-10-septembre-2020
https://www.onthisday.com/articles/dog-unearths-cave-of-antiquity
https://archeologie.culture.fr/lascaux/fr