Le guerrier qui reprend Jérusalem aux Croisés, un héros origine kurde des Arabes Issu d’une grande famille kurde, il rêvait d’unifier le monde musulman. Combatif et tenace pour imposer la foi sunnite, il sut pourtant faire preuve de mansuétude envers ses ennemis. Il est le héros mythique d’un Orient que l’Occident apprend enfin à connaître. Le guerrier qui reprend Jérusalem aux Croisés en 1187 a mis fin à la division du monde musulman en abattant le califat chiite d’Egypte. Il deviendra un héros de référence pour les nationalistes arabes du XIXe siècle. Bien que KurdeC’est avec l’islam que les Arabes sont entrés dans l’histoire et c’est en arabe que l’islam s’est révélé avant de s’affirmer comme une religion à vocation mondiale. Ce double lien perturbe encore aujourd’hui les définitions. Le sentiment national arabe ne se départit que très rarement de la référence islamique, tandis que la résurgence de l’islam apparaît à beaucoup, surtout lorsqu’elle est alimentée par les pétrodollars saoudiens, comme un moyen d’imposer une vision arabe du monde aux populations diverses qui habitent l’Indonésie, la Bosnie, le Pakistan, le Nigeria, le Turkestan chinois et, de plus en plus, l’Europe occidentale. Un personnage historique plus que d’autres incarne ces ambiguïtés : celle de Saladin (1137-1193), fils d’un officier kurde sacré héros arabe par les nationalistes du XXe siècle pour avoir repris Jérusalem aux Croisés.
Dès les premières conquêtes, la civilisation musulmane s’alimente des contributions des peuples conquis – byzantins, ibériques ou berbères. La légitimité, toutefois, y reste avant tout tribale. De même que la religion : sous les Omeyyades et en Al-Andalus, devenir musulman équivaut à se faire, en quelque sorte, arabe par adoption. Les choses changent avec la mise en place du califat abbasside en 750, au terme d’une révolte fomentée au Khorassan. La civilisation persane, d’abord, résiste mieux – au point d’utiliser l’islam comme un vecteur de son influence. L’étendue même de l’empire met en difficulté le modèle d’assimilation des élites conquises aux clans bédouins. Et surtout, les conquérants sont fatigués.Devenus princes, commerçants, navigateurs, ils recourent de plus en plus, à partir du IXe siècle, à des armées composées d’esclaves ou de mercenaires, qu’ils engagent parfois en bloc, avec leur chef tribal persan, arménien, kurde ou, de plus en plus souvent, turc. Ces combattants se voient confier des territoires dont ils peuvent exploiter les revenus fiscaux, à charge pour eux de fournir les nécessaires contingents armés. Si tous agissent au nom du calife, beaucoup n’en font en réalité qu’à leur tête, voire fondent leur propre État sous son obédience toujours plus théorique.
Au moment où la première Croisade fond sur l’Asie mineure en 1096, c’est aux Etats successeurs d’un éphémère empire turc, celui des grands Seldjoukides, que les soldats de la Croix arrachent les territoires d’Edesse, Antioche, Tripoli ou Jérusalem. Il n’est pas facile de mesurer exactement la perte que représente pour le monde musulman la chute de cette dernière en mains chrétiennes le 15 juillet 1099. Sainte par son rôle éminent dans les deux religions monothéistes dont l’islam se veut le successeur, la ville occupe également une place centrale dans un épisode mystérieux du Coran qui voit Mahomet transporté vers la «mosquée lointaine» (Al-Masjid Al-Aqsa), où les grands prophètes de la tradition judéo-chrétienne prient sous sa direction, puis conduit en présence de Dieu.Abondamment enrichie au cours des siècles, cette tradition semble avoir été rattachée très tôt à Jérusalem où une croyance également précoce place l’accomplissement de la fin des temps. C’est autour du rocher où le Prophète est réputé avoir pris son élan pour son ascension que le premier conquérant de la ville, Omar, aurait édifié un modeste lieu de prière destiné à devenir, sous l’un de ses successeurs, Abd al-Malik, le dôme du Rocher, dont l’édification est rapidement suivie par celle de la mosquée Al-Aqsa – deux des principales réalisations architecturales des Omeyyades. Dans les siècles qui suivent, toutefois, l’image de Jérusalem semble s’effacer. Le centre de gravité du monde musulman, on l’a dit, s’est déplacé à l’Est. Les rivalités entre émirs dominent la scène au point d’en pousser certains à chercher sous le manteau l’alliance honteuse des Francs. Si ces rivalités laissent intacte l’unité de principe des musulmans, cette dernière est mise à mal par une autre division, plus fondamentale : celle qui oppose le monde sunnite au califat fatimide d’Egypte, d’obédience chiite. Bref : si l’invasion franque représente incontestablement un choc jusqu’à Bagdad, les réactions qu’elle suscite restent d’abord éparses.Les choses changent à partir de 1144. Cette année-là, l’atabeg (régent) turc de Mossoul, Zengi, reprend Edesse (l’actuelle Urfa, au sud-est de la Turquie) au chevalier franc Josselin de Courtenay. Cette défaite chrétienne motivera la deuxième Croisade. Elle semble également marquer dans le monde musulman l’émergence d’une volonté de reconquête que le fils de Zengi, Nur ad-Din, alimente délibérément. Soutenus par ce dernier, les religieux se font les propagandistes du jihad, parfois contre les préoccupations plus terre à terre des autorités politiques et militaires. Les ouvrages vantant les mérites de Jérusalem se multiplient. Nur ad-Din fait construire à Alep une chaire (minbar) de bois incrustée d’ivoire qu’il destine à la mosquée Al-Aqsa. Mais c’est en Syrie qu’il guerroie pour y recréer l’unité volée en éclats à la mort de son père en 1146. Et c’est Saladin qui réalisera son vœu. Fils du gouverneur kurde de Tikrit, vite contraint à l’exil, Yussuf ibn Ayoubi dit Salah ed-Din – la fermeté de la religion – est entré au service de Nur ad-Din vers 1150, à la suite de son oncle Shîrkûh. Il réalise ses premiers hauts faits en Égypte où il évince en 1169 le calife fatimide pour rétablir l’orthodoxie sunnite.Ce service éminent rendu au calife abbasside Al-Mustadî lui permet, à la mort de Nur ad-Din en 1175, de revendiquer sa succession en tant que protecteur de son fils mineur. Il le fait en se présentant au Commandeur des croyants comme l’«adversaire que nulle calamité ne pourra abattre» des Francs, et promet de combattre pour rendre aux croyants sans qu’ils «n’aient besoin de sortir la main de leur manteau» «la mosquée où Dieu transporta son serviteur pendant la nuit». Comme Nur ad-Din avant lui, Saladin parle de Jérusalem mais commence par guerroyer en Syrie où il doit asseoir un pouvoir d’autant plus contesté que sa légitimité est douteuse.
Entre une escarmouche et une trêve avec les Francs, il assure Damas et Alep avant de s’intéresser à Mossoul, dangereusement près de Bagdad. Ces conquêtes, répète-t-il dans les courriers qu’il adresse au successeur nettement plus réticent d’Al-Mustadî, Al-Nasir li-Din Allah, visent à réaliser l’union des croyants pour mieux bouter le Franc hors du Dar al-Islam. Stratégie ? Sans doute pas uniquement : Saladin est réellement l’homme pieux, attaché à respecter les principes de l’islam qu’une propagande soigneusement orchestrée présente à ses contemporains. Mais quel que soit son prestige, Jérusalem n’est pas un centre de pouvoir.
En 1187, le remuant Renaud de Châtillon, auteur de plusieurs raids très critiqués, y compris dans son camp, contre des caravanes musulmanes, récidive sur la route de Damas. Cela tombe bien pour Saladin, dont l’inaction envers les Francs est de plus en plus critiquée. L’offensive qu’il lance avec quelque 30 000 hommes est foudroyante. Les armées chrétiennes subissent une défaite décisive à Hattin, aux abords du lac de Tibériade, au mois de juillet, puis perdent la quasi-totalité du littoral méditerranéen. Jérusalem n’a plus d’armée vraiment capable de la défendre. Balian d’Ibelin, qui défend la ville sainte, négocie sa reddition le 2 octobre. Ceux des habitants qui peuvent payer la rançon fixée sont libres de partir avec leurs biens personnels, les autres sont réduits en esclavage – et, pour une part, rachetés par Saladin lui-même qui les aurait libérés. Quant aux chrétiens orientaux, s’ils ne sont pas exemptés de la rançon, ils sont autorisés à rester dans la ville où ils ont toujours vécu.Cette solution modérée au regard du sac imposé par les Croisés un siècle plus tôt n’exclut pas les pillages de biens religieux. Ni d’autres exactions si on en croit la description du chroniqueur persan de Saladin, Imad ad-Din : «Que de femmes dont les voiles furent déchirés […] Que de belles furent mises à rude épreuve ! Que de vierges furent déflorées ! Que de nobles dames furent épousées de force !» Mais la grande affaire est bien sûr de restaurer les lieux saints – le dôme du Rocher, transformé en église et la mosquée Al-Aqsa, utilisée comme résidence par les Templiers. Dans la foulée, de nombreuses églises sont détruites, à l’exception du Saint-Sépulcre. Toujours soucieux de son image, Saladin l’a épargné, comme l’avait fait avant lui le premier conquérant de Jérusalem, le deuxième calife Omar, auquel il espère être égalé par la postérité. Il lui faudra attendre sept siècles. Si paradoxalement la littérature chrétienne va le considérer avec affection – au point de l’imaginer secrètement converti – la mémoire arabo-musulmane lui préfère la figure plus consensuelle de Nur ad-Din. Mort, dit-on, ruiné par ses largesses, il a dû rendre le littoral syrien à Richard Cœur de Lion en 1192. Même Jérusalem a à nouveau transité en mains chrétiennes, par traités, entre 1229 et 1244.Mais surtout, le monde où il a taillé sa gloire est condamné. En 1258, le sac de Bagdad par les Mongols provoque une onde de choc sans commune mesure avec celle causée par la chute de Jérusalem. Chassé, le califat abbasside se survit encore trois siècles au Caire sous la protection du pouvoir turc des Mamelouks avant de tomber en mains ottomanes. L’empire cosmopolite dont le souverain est désormais l’ombre de Dieu sur terre déplace son centre géographique vers l’Ouest tandis que l’influence persane s’y affirme encore avant de céder le pas, à partir du XIXe siècle, à une attraction européenne croissante. Si l’arabe continue d’être la langue privilégiée de la foi et des études religieuses, les hommes qui s’en réclament le parlent de moins en moins et en Occident on ne les nomme plus, quelle que soit leur origine, que les Turcs. Dernière figure héroïque d’un empire déjà fortement métissé mais encore arabe, au moins, dans ses références, Saladin reprend du service, de façon finalement peu surprenante, au moment où l’Occident apparaît à nouveau comme une menace. Le sultan Abdül Hamid II le convoque à la fin du XIXe siècle pour alimenter l’hostilité aux visées britannique et française sur son empire. A la même époque, le poète égyptien Ahmed Chawqi le place, avec le conquérant de Constantinople Mehmet II, au sommet du mérite musulman, tout de suite derrière les quatre premiers califes.Seuls les Kurdes, qui en font un héros national, semblent se rappeler son origine. Elle ne l’empêche pas d’être adopté par Nasser – n’a-t-il pas, lui aussi, régné sur l’Egypte ? – par Saddam Hussein – né, comme lui, à Tikrit – et Hafez el-Assad comme symbole de leur résistance à l’impérialisme occidental. Quant à la question de savoir quelle appartenance il aurait personnellement favorisée, elle est sans doute parfaitement vaine. Rien ne permet en effet de dire qu’il voyait une quelconque contradiction entre son engagement pour une dynastie arabe porteuse de la légitimité islamique et sa propension à installer des membres de son clan kurde à tous les postes clés de son empire.
Bataille de Hattin en 1187 entre le leader musulman Salah al-Din (Saladin) et les croisés. Les chrétiens ont été vaincus, mettant fin à l’occupation latine de Jérusalem et mettant effectivement fin à l’ occupation chrétienne de Jérusalesm. Les musulmans ont récupéré Jérusalem et d’autres territoires détenus par les chrétiens. La perte de Jérusalem a provoqué la troisième croisade chrétienne en 1189.La bataille s’est déroulée près de Tibérias dans l’actuel Israël. Le champ de bataille, près de la ville de Hittin, avait pour principale caractéristique géographique une double colline (les « cornes de Hattin ») à côté d’un col à travers les montagnes du nord entre Tibérias et la route d’Acre à l’est. La route de Darb al-Hawarnah, construite par les Romains, a servi de principal passage est-ouest entre les gué du Jourdain, la mer de Galilée et la côte méditerranéenne.
Lors de la bataille de Hattin, il rencontra les forces combinées de Raymond III de Tripoli et de Guy de Lusignan, roi consort de Jérusalem. Dans cette seule bataille, l’armée des croisés a été détruite par l’armée motivée de Salahuddin.
C’était un ravage pour les Croisaders et un tournant dans l’histoire mondiale. Reinald de Chatillon a été capturé par le Salahuddin et a été personnellement responsable de son meurtre en représailles pour l’attaque des caravanes musulmanes.Les gens de ces caravanes avaient, Idle, obsolète sa miséricorde en disant le cessez-le-feu entre les croisés et les musulmans, mais le Reinald de Chatillon a ignoré cela et a aussi insulté le prophète islamique Muhammad avant de tuer et de torturer un certain nombre d’entre eux. Sur ce, Salahuddin veut tuer personnellement Raynald.
https://www.letemps.ch/monde/saladin-heros-kurde-arabes
https://www.herodote.net/Un_heros_pour_les_Arabes-synthese-241.php
https://www.lexpress.fr/informations/l-epopee-de-saladin_645808.html