Le célèbre prêtre italien a été pendu et brûlé à Florence sur ordre du pape Alexandre VIGirolamo Savonarole (1452-1498) était un prédicateur, réformateur et martyr italien de Ferrare. Il était membre de « l’Ordre dominicain », ou de « l’Ordre des prédicateurs ». Il était actif à Florence à l’époque de la Renaissance. L’histoire se souvient de lui comme d’une figure instrumentale qui s’est opposée à la dictature et au pastorat corrompu qui sévissait à cette époque. Savonarole était considéré comme le seul chef après la chute des Médicis à Florence. Sous sa direction, une république démocratique a été formée et plusieurs autres réformes ont vu le jour. Savonarole a été salué lorsqu’il a prédit la réforme de l’Église par un envahisseur, Charles VIII de France. Savonarole a même influencé le nouveau dirigeant italien, qui à son tour a accru son pouvoir. Sa chute a commencé lorsqu’il s’est retourné contre le pape, ce qui l’a finalement conduit à choisir la mort.La vie du prédicateur et réformateur italien Girolamo Savonarole, (Jérôme Savonarole) représente l’un des chapitres les plus palpitants de l’histoire de la ville de Florence et contre la dictature théocratique de Florence de 1494 à 1498.«Votre vie est une vie de porcs» : voilà ce que Fra Girolamo Savonarole, dominicain renié par son ordre, assène aux Florentins de la Renaissance, amateurs de bals, de mascarades, de carnavals, d’art, de vin et de luxes. L’engouement pour l’Antiquité qui enfièvre l’Italie horrifie Savonarole : à la Rome eschatologique de la décadence, au paganisme violent et sensuel, aux dangereuses nudités des portraits et des statues, au commerce des indulgences, il oppose un retour à l’ascétisme chrétien et aux préceptes des pères de l’Église.Personnage austère, mystique et érudit, Savonarole est envoyé par son ordre à Florence en 1482. Dès ses premiers écrits, une idée obsédante s’esquisse : celle que son temps est un temps maudit, de luxure, de péché, éloigné de Dieu.Et lui, moraliste et prédicateur brillant, est le prophète de ce temps, l’envoyé du ciel qui doit aider les Florentins à accueillir le juste châtiment qui s’abattra sur eux. Aux curieux qui s’amassent autour de lui dans les rues de Florence, le chien de Dieu prédit qu’un «nouveau Cyrus» viendra dévaster la ville et y réinstaurer l’ordre : ce sera Charles VIII, qui vient d’écraser Gênes et se présente aux portes de Florence avec une armée de 15 000 hommes, nourrissant l’ambition de s’emparer du royaume de Naples, de déposer le pape Alexandre VI Borgia et de reconquérir Jérusalem.La prise de pouvoir Savonarole, qui avait refusé l’absolution à Laurent de Médicis deux ans auparavant, et combattait farouchement le dépravé Alexandre VI, se fait le porte-parole de Florence auprès de Charles VIII : il parvient à éviter le sac de la ville, et les Médicis sont chassés du pouvoir. Le prédicateur se trouve dorénavant à la tête de Florence reconnaissante, et instaure une «République chrétienne et religieuse» qui bascule vite dans la dictature théocratique. Pendant quatre ans, les Florentins, impressionnés par la justesse de ses prophéties, tentés par l’âge céleste qu’il promet à la ville, et peut-être aussi révoltés que lui par la corruption grandissante des élites religieuses, aristocratiques et marchandes, se plient d’abord à ses édits sans résistance. En 1495, les pamphlets et les prêches qui dénoncent les excès des Médicis ont remporté un tel succès que les Florentins expulsent le jeune Pierre de Médicis de la ville avant de piller son palais.Dans la nouvelle République, dont Jésus-Christ est déclaré le seul roi mais où Savonarole règne de fait en maître, les édits s’enchaînent : la torture est abolie, les impôts sont répartis de façon plus équitable, la charité est institutionnalisée, une cour d’appel est mise en place, la corruption est traquée impitoyablement, les usuriers abusifs sont poursuivis en justice, la première bibliothèque publique est fondée.D’autres mesures, moins réjouissantes, se cachent cependant sous ces belles initiatives : auparavant passible d’une simple amende, la sodomie devient un crime puni de mort, et Savonarole fait de la jeunesse son bras armé en enrôlant des adolescents qui sillonnent la ville pour intimider, voire menacer, les Florentins qui se montreraient rétifs à la charité, ainsi que pour débusquer les comportements licencieux et encourager les uns à dénoncer les autres.Une culture de l’espionnage et de la délation s’installe progressivement ; et après la fermeture des tavernes, des maisons closes, la transformation des bals en processions, c’est l’espace privé des Florentins qui est envahi par la milice des mœurs de Savonarole, qui a l’autorisation, et même l’ordre, d’enfoncer n’importe quelle porte à n’importe quelle heure pour vérifier que les habitants vivent bien de façon chrétienne.
Apothéose et chute En 1497, cette atmosphère asphyxiante d’intégrisme atteint son paroxysme. Savonarole envoie ses jeunes disciples, des enfants et adolescents en robe blanche devenus des experts en dénonciation de « mauvaises actions », piller les habitations, les palais et les commerces, afin d’en extirper tous les objets de luxe et d’hérésie. Les miroirs, les bijoux, les cosmétiques, les vêtements ornés, les œuvres d’art narrant des épisodes mythologiques et donc païens, les vers « immoraux » de Pétrarque et la prose « profane » de Boccace, les nus de Botticelli et de Fra Bartolomeo repentants, les instruments de musique, les jeux de cartes et de dés. Le tout est entassé sur la place de la Seigneurie, et brûlé dans un immense « bûcher des vanités » qui est aussi un autodafé de chefs-d’œuvre. C’est l’excès de trop : les Florentins, auparavant dociles, commencent à s’agiter, et la ville se divise de plus en plus entre les arrabiati, les «enragés» hostiles à Savonarole, et ses partisans les piagnoni, c’est-à-dire les «pleureurs».
Quelques mois après ce bûcher, Savonarole prononce son sermon de l’Ascension le 4 mai. Et alors qu’il est en pleine prédication, de jeunes Florentins excédés transforment le rassemblement en émeute, qui dégénère elle-même en révolte généralisée : épuisé et humilié par trois longues années de rigueur, de délations et de soumissions, menacé d’excommunication, le peuple se soulève, rouvre les tavernes et les bordels ; puis lorsque Savonarole, pressé par ses partisans d’accomplir un miracle pour rétablir son prestige, recule devant l’épreuve, les insurgés sonnent la curée. La garde de Savonarole, qui s’est retiré dans le couvent Saint-Marc, est massacrée, et l’on force le moine à comparaître devant les autorités inquisitoriales venues de Rome. Comme il soutient être un envoyé de Dieu, l’adversaire de « l’Antéchrist» Alexandre VI, il est finalement condamné à mort pour hérésie et «faux enseignement». Le 23 mai 1498, on élève un bûcher sur la place de la Seigneurie, à l’emplacement exact où le moine avait fait brûler les nus de Botticelli et les vers de Pétrarque. Avec deux autres moines, il est étranglé, pendu et brûlé sous les ovations, puis ses restes sont jetés dans l’Arno avant d’éviter que des reliques ne soient récupérées pour instaurer un culte.
Controverse L’emplacement du bûcher Savonarole, pour les uns martyr et pour les autres dictateurs, est couvert tour à tour d’excréments et de fleurs pendant des années. La question de sa mémoire divise toujours. La plaque commémorative de la place de la Seigneurie mentionne un procès «inique», le moine fut admiré par Théodore de Bèze qui voyait en lui un précurseur de la Réforme. (Les théocraties de Florence et de Genève présentent d’ailleurs des similitudes), et suivi avec dévotion par d’illustres contemporains tels que Pic de la Mirandole ou Botticelli; mais le Dominicain qui se prétendait prophète, pour beaucoup d’autres, fut avant tout l’un des premiers intégristes, pour qui la lutte contre la corruption et la dépravation justifiait l’intolérance, la violence et l’instauration d’un véritable État policier. Alors, Savonarole, condamnable ou canonisable ?
https://www.historytoday.com/archive/months-past/execution-girolamo-savonarola
https://www.thefamouspeople.com/profiles/girolamo-savonarola-8475.php
https://www.revuedesdeuxmondes.fr/23-mai-1498-execution-de-savonarole/