Retraite obligé pour d’Otto von Bismarck en AllemagneOtto von Bismarck (1815-1898) est né le 1er avril 1815 en Poméranie, dans une famille de junkers, la classe des petits nobles prussiens, conservateurs, militaristes et dévoués à leur souverain.Par son action brutale à la tête du gouvernement prussien, cet homme d’État va peut-être plus qu’aucun autre infléchir le cours de l’Histoire.
C’est ainsi qu’il va transformer l’Allemagne démocratique et cultivée en un État autoritaire et militariste. Sans l’avoir consciemment voulu, il porte sans nul doute une responsabilité dans les événements qui ont conduit aux drames du XXe siècle.La fin de l’« homme fort »Guillaume Ier était mort le 9 mars 1888, et son successeur, Frédéric III, avait prié Bismarck de conserver la chancellerie. Mais le nouveau souverain, atteint d’un cancer, meurt le 15 juin, laissant le trône à son fils Guillaume II. Le nouvel empereur a vingt-neuf ans, le chancelier soixante-treize. Leurs caractères ne tardent pas à se heurter. Impatient de régner, le jeune souverain supporte mal le poids de l’expérience du chancelier ; son entourage le pousse dans cette voie en critiquant l’autoritarisme du « ministre tout-puissant ». Diplomatie, politique sociale, attitude envers le socialisme, qui regagne des voix aux élections de 1890 : autant d’occasions de conflits inévitables. Les ministres prussiens ayant pris l’habitude d’exposer leurs projets à l’empereur sans en référer à Bismarck, celui-ci leur rappelle qu’une ordonnance de 1852 place les ministres sous le contrôle du ministre-président. De son côté, Guillaume II reproche à Bismarck d’avoir reçu chez lui Windthorst, chef du parti du centre, sans l’en avoir avisé – prétention que Bismarck rejette le 15 mars 1890, au cours d’une visite orageuse de l’empereur à la chancellerie. Le 18 mars, le chancelier rédige sa lettre de démission que Guillaume II accepte le 20.Bismarck vivra encore huit ans, dans une retraite morose à Friedrichsruh. Il ne peut se résigner à son inactivité. Sa rancune envers son successeur Caprivi et d’autres ennemis s’exhale dans les interviews données à des journaux allemands ou étrangers (c’est alors qu’il révèle l’affaire de la dépêche d’Ems). Friedrichsruh devient un foyer d’opposition dont Guillaume II redoute les intrigues et leurs effets sur l’opinion publique. Un semblant de réconciliation entre l’empereur et l’ex-chancelier, en 1894, ne doit pas faire illusion. Et c’est dans la disgrâce et l’isolement grandissant que Bismarck s’éteint le 30 juillet 1898.
Député, ambassadeur, ministre, chancelier : mais quoi de l’homme ? Quelle est cette personnalité puissante qui a dominé l’Allemagne et l’Europe de son temps ?S’il fallait définir d’un mot sa personnalité si complexe et parfois contradictoire, c’est assurément le terme de réaliste que l’on retiendrait : un homme sans préjugés, qui ne croit qu’à la force, mais appliquée où et quand il le faut. « Le plus beau pâté s’effondre, s’il est retiré trop tôt du feu », disait-il dans son style imagé. Réalisme qui lui a permis de marquer l’histoire de son temps d’une empreinte indélébile.Un homme de conviction
La position apparemment imprenable de Bismarck avait un point faible : l’empereur devait le considérer comme indispensable. Le vieil empereur Guillaume Ier lui resta fidèle jusqu’à sa mort le 9 mars 1888. Il n’oublia jamais que Bismarck l’avait sauvé du « libéralisme » en 1862.Frédéric III, son fils et successeur, était lié à Bismarck par le souvenir des triomphes de 1870. Libéral en locution, il était au mieux national-libéral et, comme les autres nationaux-libéraux, aurait fait la paix avec Bismarck en échange de quelques concessions. Cependant, il était déjà mourant lorsqu’il a pris la couronne et son règne de 99 jours s’est terminé le 15 juin 1888.Guillaume II, le troisième et dernier empereur allemand, n’avait aucun souvenir des dangers passés ou des victoires passées pour le lier à Bismarck. Il représentait la nouvelle Allemagne qui ne connaissait pas de modération, l’Allemagne sûre d’elle-même qui ne reconnaissait aucune limite à la puissance allemande. En même temps, il s’impatiente du conservatisme social de Bismarck, qui semble éloigner l’empereur de la masse de ses sujets.Le différend a atteint son paroxysme après les élections générales de 1890. Bismarck n’avait pas réussi à faire entendre un cri national et n’avait pas réussi à remporter l’élection. La coalition bismarckienne des conservateurs et des nationaux-libéraux est passée de 220 à 135 ; les radicaux, le centre et les sociaux-démocrates sont passés de 141 à 207. Bismarck voulait déchirer la constitution impériale qu’il avait lui-même faite et instaurer une dictature militaire nue. Guillaume II est déterminé à poursuivre sur la voie de la démagogie, faisant encore plus appel au sentiment national allemand. Il y avait, bien sûr, aussi des éléments de conflit personnel. Bismarck s’est opposé à l’ingérence de l’empereur sur les questions de politique, tandis que William s’est opposé aux tentatives de Bismarck de manœuvrer avec les chefs de parti, en particulier avec Ludwig Windthorst, le dirigeant du Centre. Il s’agissait essentiellement d’un affrontement entre l’ancienne Allemagne Junker, qui essayait de maintenir la modération pour des raisons de conservatisme, et la nouvelle Allemagne impérialiste, qui était sans modération. Une fois que Bismarck s’est querellé avec l’empereur, il n’a eu aucun soutien réel, car il avait toujours combattu les partis des masses allemandes. Il tenta sans succès d’organiser une grève des ministres prussiens. Enfin, il a été combattu même par les chefs de l’armée. Le 18 mars 1890, il est contraint de démissionner.
A ce propos Nehru a écrit :
« Un « autre » regard sur l’Histoire du Monde »
Lettre N°128 – L’essor de l’Allemagne
https://www.universalis.fr/encyclopedie/otto-von-bismarck/5-la-fin-de-l-homme-fort/
https://www.britannica.com/place/German-Empire/The-fall-of-Bismarck
https://www.herodote.net/Le_chancelier_de_fer_-synthese-186.php