L’Oncle Hô inspire le Vietnam moderne. Le 2 septembre 1945, Hô Chi Minh proclame l’indépendance du Viêt Nam« Il y en a qui luttent quelques jours. Ils sont estimables. Il y en a qui luttent des années. Ils sont indispensables. Il y en a qui luttent toute leur vie. Ils sont irremplaçables !» Bertolt Brecht Né près du delta tonkinois sur une terre salée, désolée, où les hommes trop nombreux et trop pauvres ont toujours été rebelles, Ho avait appris la révolte au berceau. L’enfant se nomme Nguyen Tat Thanh, renonce, à 19 ans, au maigre confort familial pour courir le monde sur un bateau français qui l’emmènera jusqu’à New York, comme boy. A la veille de la guerre, il s’arrête en Europe. A Londres, d’abord, où il est plongeur, aide-pâtissier, balayeur de neige, puis à Paris, où il est « peintre en antiquités chinoises ». Mais où il adopte le nom de Nguyen Ai Quoc, « Nguyen le patriote », et apprend surtout fiévreusement le sens de mots qui vont devenir sa vie : socialisme, révolution – humanisme aussi, et marxisme.« Hô ! Hô ! Hô Chi Minh ! Che ! Che ! Guevara ! », C’est au rythme de ces deux noms symbolisant les luttes anti-impérialistes que défilaient au début des années 1970, les milliers de jeunes de la Ligue Communiste, l’ancêtre du NPA (le Nouveau Parti Anticapitaliste).Depuis les deux noms ont connu une destinée bien différente. Le visage de l’un couvre sans doute autant de tee-shirt que celui de Bob Marley, tandis que l’autre est tombé dans l’oubli. L’année du quarantième anniversaire de la mort d’Ernesto Guevara a été marquée par de nombreux livres, des milliers d’articles, des émissions de télévision et de grandes productions cinématographiques. Le même anniversaire pour celle de Hô Chi Minh (1890-1969), décédé le 2 septembre 1969, n’a donné lieu, à ce jour, à aucune manifestation de ce type. Fait significatif, le présentateur du NPA, qui avait écrit un livre pour commémorer la mort du Che, n’a pas jugé bon de reproduire l’initiative pour commémorer celle d’Hô Chi Minh, contrairement à l’attitude de ses aînés.Ce n’est certainement pas la place respective des deux hommes dans l’histoire du XXème siècle qui suffit à expliquer la différence de traitement des deux figures. Car, pendant des décennies, sans doute depuis Dien Bien Phu, aucune autre lutte du tiers-monde n’a exprimé mieux que celle du Viêt-Nam le combat pour le droit des peuples à décider de leur destin, celui de David contre Goliath. Faut-il le rappeler ? Après la terrible guerre menée par la France, les Etats-Unis prirent le relais avec la complicité de la France. Ils y mirent des moyens fantastiques : au sud, envoi d’un corps expéditionnaire de 500.000 hommes, sans compter les troupes de leurs alliés, regroupement forcé des paysans dans des «hameaux stratégiques», épandage général de produits chimiques pour éliminer toute végétation ; au nord, à partir de 1965, bombardements massifs pour annihiler toute économie. Faut-il rappeler encore que parmi les produits chimiques répandus, sur décision de Kennedy dès 1961, il y eût «l’agent orange», qui contenait de la dioxine, facteur de cancers, de malformations génétiques, qui fait encore des victimes, que les États-Unis reconnaissent mais seulement si elles sont américaines ? Faut-il rappeler que l’extension de la guerre au Cambodge en 1970, sonna également le premier acte de la tragédie khmère par la destruction des zones rurales de ce pays ?L’historien Pierre-Richard Feray évoque ainsi l’année 1972 : « au cours de l’été 1972 et jusqu’à la fin de l’année, les B 52 rasèrent littéralement le Nord-Viêt-Nam, ne négligèrent aucune cible : digues, ouvrages hydrauliques, industries, villes…Les ports furent minés ». A propos des 16000 hameaux stratégiques il utilise les termes « camps de concentration », et chiffre à 10.500.000 le nombre de réfugiés au sud. Pour l’historien : « Cette guerre ne fut pas une guerre classique. Aidés par de nombreux chercheurs américains (anthropologues, sociologues, politologues…), les stratèges américains mirent sur pied « la réponse efficace » : «urbanisation forcée et modernisation» qui sorte rapidement le pays en question de la phase au cours de laquelle un mouvement révolutionnaire rural peut espérer se créer une force suffisante pour prendre le pouvoir. La guerre chimique avec ses missions d’épandage des herbicides et des défoliants, l’écrasement de la population des régions libérées sous les bombes avaient pour objectifs primordial de chasser la population des régions libérées pour faire affluer les réfugiés vers les villes et de ce fait les placer sous le contrôle de Saigon ». Il conclut : « cette guerre, la plus longue de notre époque, fut aussi une des plus cruelles, des plus barbares. Napalm, phosphore, défoliants, gaz, tapis de bombes, engins à billes, bombes à dépression CBU-55, tout, sauf la bombe atomique fut essayé pour réduire la résistance du peuple vietnamien. On inventa même à propos du Viêt-Nam le mot écocide, voire celui d’ethnocide »Il expose ainsi les raisons de la victoire vietnamienne : « en trente ans de guerre, les vietnamiens ont renoué avec leur passé et leurs traditions. Face à la déculturation américaine, ils ont opposé avec force les valeurs de la culture vietnamienne, en y intégrant les valeurs scientifiques et techniques du monde moderne. De tous les participants au conflit, ils furent les seuls à croire en définitive que c’était pour leur seule cause qu’ils se battaient. A la richesse et au gaspillage de leurs adversaires, les dirigeants communistes, Hô Chi Minh en tête, ont toujours fait valoir cet « idéal de pauvreté » qui, à toutes les époques de son histoire, a caractérisé la culture vietnamienne. Des fusées SAM servies par l’ « l’idéal de pauvreté », et par une culture, voilà, nous semble-t-il, la clé de la victoire vietnamienne. »
La faiblesse du travail historique ou mémoriel sur la personnalité d’Hô Chi Minh, à l’exception des études de quelques chercheurs isolés, n’est pas surprenante lorsqu’elle vient de forces qui ont mené les guerres d’Indochine. Mais que cette attitude soit celle de forces qui se veulent héritières des combats anticolonialistes interpelle. Tout particulièrement en France, dont l’histoire se mêle étroitement à celle du Viêt-Nam, ce dont la vie d’Hô Chi Minh elle-même témoigne puisqu’il participa à la fondation du Parti Communiste Français au Congrès de Tours en y déclarant « nous voyons dans l’adhésion à la IIIème internationale la promesse formelle du Parti socialiste de donner enfin aux questions coloniales l’importance qu’elles méritent », et en étant ensuite correspondant de plusieurs journaux du mouvement ouvrier et révolutionnaire, tel La Vie Ouvrière.Ho était alors avant tout un « patriote » dont le Parti va faire un technicien. Ecoles révolutionnaires à Moscou, où il rencontre Staline ; mission en compagnie de Borodine auprès du gouvernement révolutionnaire chinois à Canton, où Mao Tsé-toung n’est alors, aux yeux du Komintern, qu’un « déviationniste »… Mission également auprès des exilés vietnamiens en Chine, avec qui il fondera, en 1930, à Hong Kong, le Parti communiste indochinois.
De Thaïlande en Indonésie, en passant par le Yunnan, tissant partout la trame patiente de la subversion, Ho entre à petits pas discrets dans la mystérieuse mythologie asiatique. On le dit mort ici : d’un poème, griffonné, il fait connaître là qu’il est toujours vivant. Et lorsque le Japon capitule, que Giap occupe Hanoi où se lèvent les premiers drapeaux écarlates frappés de l’étoile d’or, nul ne reconnaît le curieux personnage qui entre dans la capitale tonkinoise en short, une canne à la main, coiffé d’un étrange casque colonial peint en brun, un paquet de cigarettes américaines dans la poche.
Lorsque, le 2 septembre 1945, la foule amassée pour entendre proclamer l’indépendance vit s’avancer celui qui en était, disait-on, l’artisan – « Celui qui éclaire », Ho Chi Minh – il y eut un instant de stupeur indicible. Les vieux ont aussitôt reconnu Quoc ; l’effet de cette « réincarnation » a été sensationnel… » Et le contact, direct. « Cet homme qui vivait dans l’ascétisme, qui n’a jamais eu d’autre famille que son peuple, qui avait tout sacrifié à son pays, était d’une simplicité extraordinaire, qu’aucune vicissitude, aucune épreuve, aucune gloire n’a jamais modifiée, il avait ses petites roueries, comme chacun, mais il était en réalité totalement dépouillé d’artifices. Il n’avait pas subi l’influence de ses maîtres à penser, au langage sans cesse embarrassé de citations de Marx ou d’Engels. Il était resté lui-même, partisan, comme il disait, de la « bonne franquette ».
A peine sorti de l’ombre, « l’oncle Ho » allait y replonger. « Plutôt flairer un peu la crotte des Français que manger toute notre vie celle des Chinois », confiait-il en 1946, alors qu’il était prêt à négocier l’indépendance de son pays dans le cadre de l’Union française. Mais après la Conférence de Fontainebleau – bref instant d’honneurs rendus jusqu’à l’Arc de triomphe – c’est le bombardement de Haiphong, la rupture, le sanglant soulèvement de Hanoi, la guérilla, puis la guerre. De nouveau, les jungles, les légendes tissées de ténèbres, jusqu’à Dien Bien Phu, qui, en 1954, n’apporta à Ho Chi Minh qu’un compromis – la moitié, seulement, de son pays.
Il savait avec sa sagesse asiatique faite de longue patience, qu’il ne s’agissait là que de concrétiser des conditions favorables. Une fois encore, l’enchaînement, la guerre – la troisième – et, cette fois, contre la plus grande puissance de tous les temps. On vit alors tout un peuple naître et mourir sous terre, y apprendre à lire, y monter des usines, y survivre. Galvanisé une ou deux fois l’an, par l’apparition théâtrale – toujours – d’un vieillard frêle au front bombé, vêtu de son éternelle veste à col militaire, chaussé de sandales découpées dans des pneus, bonhomme un instant, implacable l’autre, et qui vilipendait « l’agresseur néo-colonialiste », en assurant ses « neveux et nièces » que le peuple vietnamien, jamais, ne se laisserait « intimider ».
La lourde et lente machinerie des négociations s’est ébranlée voilà seize mois. Toujours habile à ménager coups de théâtre et coups de poker, Ho Chi Minh misait sans doute sur un nouvel accord de Genève qui lui aurait permis?
« Un jour », de remporter une victoire électorale à laquelle il croyait toujours.
Sa politique, dont le premier objet était le retrait « total » des forces américaines du Vietnam, continuera sans nul doute d’être suivie. Mardi, son ami personnel Xuan Thuy, qui dirige aux conversations de Paris la délégation de Hanoi, tendait habilement la main à Washington en suggérant qu’un retrait « important » de G.i. suffirait à dégeler les négociations. Une manière, peut-être, de détourner l’attention de M. Richard Nixon de Saigon. Où le président Nguyen Van Thieu (1923-2001), fort de l’appui des « éperviers » américains et de nouveaux ministres obscurs mais inflexibles, a salué, en la mort de Ho Chi Minh, une « atteinte au moral de la population nord-vietnamienne aussi bien qu’à celui des troupes communistes du Sud ».
La tentation est grande de croire que la mort d’un homme peut changer le cours d’une guerre, ou d’un équilibre délicatement maintenu entre les « colombes » de Moscou et les « éperviers » de Pékin. Depuis deux ou trois ans, la santé de Ho Chi Minh s’affaiblissait rapidement et ses cinq principaux lieutenants se partageaient la direction du pays.
Ho Chi Minh, épuisé par une vie de combats, dont la plus grande partie se fit dans la clandestinité, meurt le 2 septembre 1969, alors que le conflit fait toujours rage au Viêt Nam. Il se serait donné la mort en arrachant ses perfusions, choisissant ainsi le jour de sa mort. Celle-ci est officiellement annoncée comme ayant eu lieu le 3 septembre pour ne pas ternir la fête nationale de l’indépendance du 2 septembre. Ho Chi Minh voulait que ses cendres soient répandues au-dessus du pays, du nord au sud. Pourtant, ses héritiers décidèrent de l’embaumer comme Lénine, contre sa volonté, ceci en attendant que la réunification se fasse. Ses cendres n’ont finalement jamais été dispersées et son corps embaumé repose toujours dans son mausolée à Hanoï sur la place Ba Dinh. À propos de son testament, le journaliste anticolonialiste Jean Lacouture dira : « Au moment de dire adieu à son peuple, Ho ne plastronne pas, ne prend pas le ton de héros à mots historiques et à posture tragique : il parle des tâches immédiates à accomplir – la libération du territoire – sur le ton d’un chef en pleine activité, d’un patron au travail. On retrouve là une des constantes du personnage, la primauté donnée à l’action, aux réalités, à la praxis.»
Le 2 septembre 1945, Hô Chi Minh proclame l’indépendance du Viêt Nam
Hô Chi Minh proclame la République Démocratique du Viêt Nam à Hanoï et l’indépendance du pays sur la Place Ba Dinh. Le Vietminh, fondé en 1941 par d’anciens dirigeants du parti communiste indochinois, profite de la capitulation du Japon et de l’incapacité des Français à reprendre le pouvoir, pour proclamer l’indépendance. Ho Chi Minh devient président du nouveau gouvernement révolutionnaire. La France, vaincue à Dien Bien Phu en 1954, reconnaîtra l’indépendance du Vietnam avec les accords de Genève en 1956.
https://www.humanite.fr/anniversaire-loncle-ho-inspire-le-vietnam-moderne-676403
http://lafauteadiderot.net/Ho-Ho-Ho-Chi-Minh
https://perspective.usherbrooke.ca/bilan/servlet/BMEve/1462
https://www.letempsdescerises.net/wp-content/uploads/2019/08/Extrait-Ho-Chi-Minh.pdf
https://www.lexpress.fr/actualite/monde/1969-la-longue-passion-de-ho-chi-minh_2095414.html
http://zims-fr.kiwix.campusafrica.gos.orange.com/wikipedia_fr_all_maxi/A/H%C3%B4_Chi_Minh