Traité de Francfort : l’Alsace-Moselle est annexée à l’Empire allemand Le 10 mai 1871, Jules Favre et Adolphe Thiers concluent au nom de la France un traité de paix avec l’Allemagne à l’hôtel du Cygne, à Francfort (Allemagne). Ce traité met fin à la guerre franco-prussienne enclenchée le 19 juillet 1870 par les maladresses de Napoléon III et de son gouvernement.Une des clauses du Traité de Francfort allait se révéler très lourde de conséquences. L’annexion de territoires français par l’Empire allemand posait la question des populations d’Alsaciens ou Lorrains.Pénibles sacrifices Le 28 janvier 1871, le gouvernement de la Défense nationale, issu de la proclamation de la République, a signé un armistice qui a mis fin aux combats pour une durée de quatre semaines. Une Assemblée nationale a été élue dans la foulée. Elle a désigné Adolphe Thiers comme « chef du gouvernement exécutif de la République française ». Sa première mission fut de préparer le traité de paix définitif avec l’empire allemand. Pour les Allemands, la cession des deux départements alsaciens est une revendication incontournable. Mais les Français se voient réclamer aussi Metz et la Lorraine du nord bien que ces terres de culture française n’aient aucun motif d’appartenir à l’Allemagne. Le chancelier Bismarck ajoute à ces revendications territoriales une indemnité de guerre colossale, chiffrée à six milliards de francs de l’époque. L’indemnité est réduite à cinq milliards (en bon bourgeois, Thiers confiera plus tard qu’il est toujours possible de récupérer des provinces perdues mais que les milliards envolés le sont à jamais !). Il est convenu que les troupes d’occupation se retireront à mesure que sera versée l’indemnité. Thiers obtient aussi que la place forte de Belfort, qui a résisté au-delà de l’armistice, soit conservée à la France en échange du droit pour les Allemands de défiler à Paris.Le traité de Francfort venait couronner la politique de Bismarck : achèvement de l’unification de l’Allemagne du nord et du sud sous domination prussienne ; affaiblissement de la France mais aussi du Concert européen ; début d’une période de prépondérance allemande en Europe. Le traité confirma la perte de l’Alsace-Lorraine, mais la France conservait Belfort, qui avait résisté héroïquement pendant la guerre. Pour obtenir un certain territoire autour de cette ville, Thiers accepta de céder un territoire moins symbolique mais plus riche du côté de Thionville sur la frontière avec le Luxembourg. Les Alsaciens-Lorrains devenant sujets allemands étaient environ 1,6 million. Une « clause d’option » leur fut garantie, qui leur permettait d’opter pour la nationalité française, à condition d’émigrer en France, ce que firent 60 000 d’entre eux. Le traité prévoyait le versement par la France d’une indemnité de guerre de 5 milliards de francs, l’occupation militaire du territoire français par les troupes allemandes devant se réduire et cesser au fur à mesure du versement des échéances. La France, dont l’économie était encore très solide, put verser la somme en deux années seulement. Pour beaucoup, la guerre franco-allemande marquait bien plus qu’une rupture politique, une rupture de civilisation. Cette guerre était différente des précédentes, et elle s’achevait sur un traité qui empêchait le retour à une paix acceptable.Pour éviter toute tentation de revanche de la France, Bismarck élabora un système diplomatique visant à isoler la France et à réduire le rôle du Concert européen, la diplomatie multilatérale de l’époque. D’emblée, il estimait impossible le retour à des relations normales entre la France et l’Allemagne. Il avait raison. Napoléon III lui-même, depuis son exil britannique, ne dit pas autre chose : « Cette paix ne peut qu’être une trêve et elle prépare bien des malheurs pour l’Europe. » Les deux ennemis se retrouvaient d’accord.
Dire que la mémoire nationale fut marquée par le traité de Francfort serait un euphémisme. Ce fut un traumatisme profond et la cause d’une réconciliation impossible entre la République française et l’Empire allemand. La reconquête de l’Alsace-Lorraine devint un objectif lointain de la Troisième République puis un but de guerre dans le premier conflit mondial. Les troupes alliées entrèrent dans Strasbourg le 22 novembre 1918 et les territoires alsaciens-lorrains se virent officiellement restitués à la France par le traité de Versailles du 28 juin 1919.